Warner finit par relever la tête après avoir touché le fond dans son DC extended universe, qui laisse malgré tout des traces d’implosions. « Aquaman » a signé le revirement du studio afin de s’aligner sur une tendance, une formule qui séduit le grand public. Outre ce constat grossier, le film parvenait à se démarquer dans un bon travail de mise en scène, ce qui n’est malheureusement pas le cas pour cette dernière tentative… David F. Sandberg, fraîchement recueilli par la grosse écurie, a su faire preuve de créativité, avant de sacrifier sa personnalité dans un blockbuster lambda. Bien entendu, les enjeux sont tout autre dans ce rachat de la dernière chance. Le film s’illustre tout de même sans grandes ambitions, si ce n’est remplir un portefeuille qui servira à engendrer d’autres partitions affligeantes à l’avenir.
C’est un jeu de funambulisme, mais le récit trébuche sur un mariage de tons qui ne fonctionne pas. Tantôt juvénile et simplet, tantôt super-héroïque et méta, tantôt comique et insistant, nous sommes plongés dans l’air du temps, en explorant des conventions sociales qui peuvent alarmer. Mais la décadence justifie tout et répare tout. Difficile de trouver de la maturité derrière cet amas d’idées, écrasées comme le cahier des charges l’obligeait. On varie donc les plaisirs entre divers environnements, comme l’école, la maison et les rues de Philadelphie, où Billy Batson (Asher Angel) cherche à s’épanouir. Mais comme tout orphelin d’Hollywood, il fallait bien le présenter avec la plus grande maladresse et innocence pour gagner en empathie. Malheureusement, cela ne repose que sur des punchlines loin d’être à la hauteur d’un personnage si complexe. Il en ressort un divertissement familial trop paresseux pour qu’on le prenne au sérieux. On nous demande juste d’en rire et de danser sur le rythme d’un duo comique, dont on connaît que trop bien les recettes.
Zachary Levi endosse peut-être bien le costume de Shazam, mais ce n’est que sur la forme. Le fond laisse paraître tant de fragilité, car l’intrigue s’étire beaucoup trop sur des sous-intrigues négligeables. On surexplique sans cesse, sans moindre subtilité, là où son camarade des abysses avait eu un peu plus d’audace par moment. Rien que l’introduction de l’enfant orphelin est invraisemblable et couverte de bêtises sans nom. L’écriture constitue un problème dans cette aventure qui se permet de se priver de crédibilité et de justice. On distingue deux personnages différents au lieu d’un, au sein d’une même entité qui aspire à la recherche d’une famille. Ce décalage nuit à la souplesse de l’entourage de Billy. Et que l’on mentionne l’antagoniste, qui a mérité son petit développement de son côté, le personnage de Mark Strong passe à côté tout, car noyé dans un bain d’effets aussi kitchs qu’oubliables.
À l’heure d’aujourd’hui, avec un public qui a grandi avec ses modèles héroïques, difficile de le surprendre en matière d’origin story. Mais vouloir en faire trop, c’est vouloir se justifier et se convaincre de quelque chose de malsain à ce niveau. Sandberg a un défaut sur le timing comique, ce qui ne lui ressemble pas. À croire que « Shazam! » est autre chose qu’un don, c’est une malédiction. Billy est à la hauteur de ce qu’on lui demande de faire, mais n’est pas assez mature, et c’est bien normal dira-t-on. Mais le film souhaite joue sur trop de fronts à la fois et ne peut satisfaire tous ses enjeux, aussi mineurs soient-ils. En somme, le projet n’est qu’un succès qui repose sur le merchandising, en pensant au copain trop fan de comic-books, et sur son élan burlesque à la sauce Marvel, comme si de rien n’était.