Snyder est un réalisateur qui globalement m’a toujours fait bonne impression, hormis sur son Man of Steel, moyen. Sucker Punch est, à l’instar de ses films les plus personnels une grande réussite. Une ode à l’imaginaire diront certains, pour ma part une ode à la futilité. Car oui ce film est terriblement futile, mais qu’est-ce que c’est maitrisé. Ça me rappelle un peu Argento sur son Suspiria, un scénario conventionnel de base pour porter un travail époustouflant.
En effet d’un point de vue formel Sucker Punch est excellent comme souvent chez Snyder. Grand maitre de l’esthétique clipesque, il livre une mise en scène grasse, enveloppante, ultra-travaillée, parfois un peu grandiloquente mais souvent impressionnante. On est aux limites de la métaphore, tout son travail étant très artificiel, mais compte tenu de la virtuosité du réalisateur, on échappe au gloubi-boulga prétentieux pour un résultat à l’inverse d’une fluidité extrême et d’une intelligence constante. A noter qu’il met fort bien en valeur ses charmantes actrices ! Cela se retrouve aussi dans l’esthétique, avec les décors, la photographie. C’est là aussi très retravaillé, peu naturel, mais c’est mis au service d’une ambiance, d’une atmosphère très singulière, et le résultat est impeccable. D’autant que la qualité des effets spéciaux est là aussi, en dépit d’un budget moindre que bien des blockbusters et super-productions. Formellement il n’y a donc pas grand-chose à redire.
Le scénario est prétexte et d’aucun le trouvera répétitif. Mais franchement le film est accrocheur. Très rythmé, offrant des mésaventures très originales à ses héroïnes, brassant des thèmes variés, souvent traités en non-dit, en métaphore et en transparence, Sucker Punch est surtout une expérience très originale et très prenante. A la limite c’est presque un film qui n’aurait pu exister qu’au travers de la musique, et évacuer les dialogues. Le début le prouve, et la suite aurait pu être du même acabit et être aussi passionnant. Ce film est avant tout sensoriel, allégorique, et à l’image de Suspiria que j’évoquais en introduction, l’intrigue n’est finalement que secondaire. Le final, audacieux, le prouve.
Les acteurs sont encore pour beaucoup dans la qualité du résultat. A mon sens le choix de Browning dans le rôle principal est juste parfait. C’est vraiment le genre de rôle qui lui va à ravir, et elle fait des merveilles tant comme actrice et comme chanteuse aussi. Elle est un atout majeur pour le métrage, et même si elle est solidement entourée par des actrices séduisantes, elle n’a aucun mal à s’imposer. Dans les seconds rôles plus connus on reconnaitra Carla Gugino, bien à sa place elle aussi, et un Scott Glenn qui soigne chacune de ses apparitions.
Enfin je consacre quand même un paragraphe à la musique, puisqu’elle est une actrice à part entière du résultat à succès du film. Les morceaux, bien connus pour la plupart s’enchaine, baignant le film dans une vraie orgie musicale ! C’est parfaitement retravaillé et agencé, et la cohérence image-son est remarquable. Encore une fois Sucker Punch prouve qu’un grand film ne peut se dispenser d’une grande bande son, originale ou pas. Tout dépend de la cohésion du tout, un film étant autant visuel que sonore.
J’arrête ici ma critique, déjà bien longue, en disant que Sucker Punch est le genre de film qui divise. Amateur de scénario travaillé, phobique de la débauche visuelle et des bandes son omniprésentes, phobique encore des spectacles futiles assumés (car oui, je rejoins certains avis, c’est souvent des jeunes filles en jupettes qui dézinguent des méchants) passés votre chemin. Mais pour ceux qui veulent un film d’ambiance pur, qui recherche davantage l’expérience sensorielle dans un métrage que le fond, alors foncé. Sucker Punch est presque un clip d’1 heure 45, mais quel clip ! 4.5.