Peter et Bobby Farrelly, s’étant depuis faits un nom dans l’univers du cinéma comique américain, notamment en rapport à leurs multiples collaborations avec Jim Carrey, dans les années 90, signent avec Dumb & Dumber la comédie révolutionnaire tant elle peut paraître stupide. Oui, en 1994, les deux frères s’associent pour livrer une comédie qui prend le parti, rien de moins, que de lancer sur les routes américaines les deux débiles les plus gratinés qu’il puisse exister. Les acteurs, au même titre que les réalisateurs, ne s’en cachent pas. Ils avouent assumer bien volontiers le statut de film délirant de Dumb & Dumber, par ailleurs censuré lors de sa sortie francophone. Si rien n’est en somme choquant dans ce road trip déjanté, il convient tout de même d’y entrevoir la vulgarité qui caractérise bon nombres des productions américains d’aujourd’hui, les grimaces en moins.
Dumb & Dumber, c’était aussi l’occasion, en son temps, de faire réellement connaissance avec l’un de ses interprètes principaux. Jim Carrey, inévitable trublion aussi bruyant qu’extravaguant, dans les années 90, puise concrètement ses origines comiques dans le film des frères Farrelly. Il s’agit là, en somme, d’une référence artistique absolue dans la carrière de l’acteur, référence qu’il peinera à mettre en guillemets, même lors de ses quelques apparitions dans le domaine dramatique. Cris, grimaces, improbables gestuelles du corps et du visage, accoutrement douteux sont l’apanage du comédien, qui trouve du vrai répondant en la personne de son collègue, Jeff Daniels. En ce qui concerne ce deuxième, en dépit de quelques apparitions par la suite, la comédie des frères Farrelly reste l’apogée de sa carrière, n’ayant jamais réellement été orientée entre comédie et dramaturgie. Le bonhomme est aussi exubérant que son ami et son nom restera désormais célèbre pour la simple raison de sa présence au casting du présent film.
En dépit de son ton absurde, de son humour pachydermique et de ses enchaînements de gags scatophiles, le film reste une référence musclée en matière de comédies US. Un certain public s’identifie facilement à ce type de productions délirantes, alors que d’autres, prennent les jambes à leurs coups, fatigués des hurlements des protagonistes. On ne parle pas ici de stéréotype, les personnages étant si particulier, si débiles qu’ils constituent un inédit dans le genre. Tout le monde n’appréciera pas. En ce qui me concerne, alors que j’avoue avoir bien ri à quelques occasions, une bonne majorité du film m’a laissé de glace, voire m’aura même énervé faute de manque de bon goût. Le coup du laxatif, le coup des piments rouges, les costumes improbables, les séquences de rires bruyantes entre les deux compagnons de route, tout un tas d’archétypes comiques ici poussés à l’extrême et qui irrite celui qui ne s’y attendait pas ou qui n’adhère pas au style.
Quoiqu’il en soit, le premier film des frères Farrelly est ancré dans les annales du cinéma comique américain. Révolutionnaire et libérateur pour certains, stupide et grossier pour d’autres, Dumb & Dumber est un succès financier indéniable, une curiosité qui n’avait alors que très peu de concurrents. Alors qu’en fin d’année 2014, nous attendons une suite au duo LIoyd et Harry, l’occasion est propice pour se replonger le temps nécessaire dans ce film éminemment réputé pour sa bêtise assumée. 07/20