L'histoire d'un père qui va prendre conscience d'un monde de profit, au milieu de sa forêt.
Ah que ce sujet est casse gueule ! Et au moins peut-on remercier le réalisateur de chercher une échappatoire au manichéisme gentil / méchant. Le sujet de la santé est le plus complexe, puisque effectivement, l'allopathie agressive et chirurgicale est bizarrement efficace. Et les sommes en jeu sont devenues tellement astronomiques, avec l'aval de tous les gouvernements, que l'on peut se poser pas mal de questions. Le doit-on ? C'est un peu la problématique du film.
Puisque l'on n'a pas toutes les données du problème (surtout avec ce domaine couvert par une certaine logique du secret médical, notamment celle bien commode des brevets), puisque l'on peut toujours théoriser l'apport de la science moderne médicamenteuse face à la meilleure hygiène générale des pays occidentalisés, sans pouvoir un jour définir qui est le plus efficace.
Alors, le débat est sans fin, et il est plus que logique que l'ordre national soit au service des trusts pharmaceutiques dès qu'il s'agit de sauver des prestiges de référence mondiaux, ou qu'il s'agit de garder à l'esprit des moutons que l'on s'occupe bien d'eux et qu'il n'y a jamais d'erreurs et encore moins de malhonnêteté. Qui a parlé de sang contaminé ? Qui a parlé de catastrophes sanitaires dues aux vaccins ?
S'il n'y avait ces désagréables manants sidéens d'Actup qui sont les rares à attaquer de front les bienfaiteurs de la santé, le statu quo serait presque aussi silencieux que parfait.
Car si l'on n'a pas forcément besoin d'une voiture, et qu'on peut dénigrer autant que l'on veut un constructeur ou le principe même de l'automobile en bon écologiste à pédales, il est beaucoup plus compliqué de mordre la main qui vous soignera un jour ou l'autre, la santé étant une chose bien fragile face à la vieillesse. Plus que face aux risques d'une société occidentale bien sécurisée. Saleté de corps imparfait qui nous fait dépendre de gens qui gagnent beaucoup sur notre dos avec la complicité de toute une profession et de l'état qui y trouve très largement son compte. Car ce ne sont pas les tarifs époustouflants des matériels du privé, médicaments et autres salaires de chirurgiens qui plombent la santé, ni la gestion opaque de la Sécurité Sociale que personne ne peut vérifier, c'est la gestion des hôpitaux et le trop de médecins ou de fonctionnaires qui y travaillent. Evidemment.
On oscille entre les deux points de vue pendant tout le film, des activistes gauchistes qui fonctionnent par paranoïa Xfilesque et par rumeurs, des professionnels qui fonctionnent par peur et par intérêt. Les premiers n'ont à perdre que leur foi en l'humanité et en leur but, les deuxièmes ont beaucoup à perdre, à tous les niveaux, et ce ne sont pas les plus abrutis.
On ressort de la salle en sachant qu'on a été menés en bateau, et la seule critique que l'on pourrait formuler sur la morale de l'histoire est que le cinéma doit normalement nous amener à espérer que l'on puisse trouver une sortie honorable à un problème grave. Ce n'est pas le cas ici, et c'est un peu dommage.
Par contre, le vrai problème, c'est que le budget, le scénario, les acteurs, l'action et surtout la réalisation ne sont pas du tout à la hauteur d'un tel sujet, de cette manière intelligente de réfléchir à cet imbroglio qui résume beaucoup de problèmes contemporains. Car après tout, qui croire ? C'est bien tout le problème. Les écolos conspirationistes frustrés de pépètes et de pouvoir ou les capitalistes purs et durs, dans une concurrence acharnée et mondiale qui commence à fissurer la langue de bois des Pasteur and Sanofi and Co des années 60.
Croze est too much (dans le mauvais sens du terme), Cornillac n'a jamais autant été une caricature du beauf de province que dans un rôle taciturne de bucheron qui scie avant de réfléchir. Mais personne ne joue mal, loin de là, tout est simplement trop prévisible. Hélas, les invraisemblances sont trop nombreuses, un peu comme un road movie qui accumule les poncifs, de manière frontale, là où les films « seul contre tous » sont généralement plus subtils. La scène de la PDGère étant le plus grand guignol, même dans « Michael Clayton », on voit des gens qui ont un peu plus peur.
Perso, en tant que « vieux » contestataire un peu avant la mode écologiste, la vie et la survie de milliards de personnes dans le monde depuis 30 ans m'a au moins montré une chose. On pourra pourrir autant que possible la planète et la nature, l'être humain est tellement souple, sa psychologie et son effet placebo interne tellement puissants, et la chirurgie au scalpel (ou chimique) est tellement perfectionnée qu'il a encore de longs jours devant lui. Un peu comme les cafards ou les virus, l'humanité est capable de se reproduire et de survivre à peu près partout, qu'importe finalement la manière. Le seul problème, c'est l'argent, et ce qu'il peut faire faire de manière erratique ou dangereuse, surtout quand c'est à court terme.