Il paraîssait difficile de faire mieux,dans le genre film de banlieues,que "L'esquive" (Abdellatif Kechiche,2004),qui dépeignait le quotidien de jeunes dans une cité ordinaire.Le cinéaste avait la bonne idée de mêler à son film une histoire d'amour parallèle à un texte de théâtre,"Le jeu de l'amour et du hasard",de Marivaux.La beauté du mélange entre cet amour cru et ce texte pur,dépouillé de sa dramaturgie par les acteurs pour se la réapproprier,charmait,sans le besoin d'un seul effet lacrymal.Ce qui rendait encore plus prenante cette description hautement talentueuse d'un milieu bouillant.Audrey Estrougo,qui réalise là son premier film,a visiblement tentée de s'inspirer de cette esquive-là,et réussit avec "Regarde-moi" à mettre en place une narration d'une belle virtuosité.Mais à part ça,difficile de trouver du charme et du talent à ce film démonstratif,et superficiel dans son discours.Le cri anti-racisme est balancé de façon lourde et banale,sans aucune subtilité,bâti sur des scènes stéréotypées et des personnages caricaturaux (la voisine blanche par exemple).Les jeunes acteurs ne s'en sortent pas mal,mais leurs personnages sont tellement improbables (la noire à la perruque,ridicule,et encore plus le message qui est censé en transparaître),les situations tellement maladroites,la mise en scène tellement mauvaise (ou comment revisiter chapitre par chapitre le cinéma pour les débutants) et les idées si mal canalisées (passage en N&B inutile,scène pseudo-musicale incohérente,etc...),que ces jeunes acteurs ont beau se débattre et déblatérer avec conviction leur texte,cela n'enlève rien à l'immaturité percutante dont fait preuve la réalisatrice.Même dans la véritable intention,le film laisse un gros doute.Reste alors une narration quasi-spectaculaire (les histoires de plusieurs garçons,dont on ne saisit au début pas tout,mais qui prennent tout leurs sens lorsqu'apparaît la partie consacrée aux filles,qui redéssine alors toute l'histoire par flash-backs),mais qui tourne