Voici le genre de film à vous rendre défaitiste quant à l'avenir du monde, mais optimiste quant à l'avenir du cinéma. Et dire que j'ai failli le manquer... On s'adonne à un tapage médiatique phénoménal autour de daubes incommensurables à vous faire vomir le cinéma, mais ce genre de film coup de poing, qui fait coïncider avec prouesse fond et forme, qui vous trouble, vous chamboule, vous renverse, et vous laisse dans cet état encore des heures après l'avoir vu, passe presque inaperçu... Ce film aux vrais airs de documentaire est un pur CHEF D'OEUVRE, je n'ai pas d'autres mots. Par le biais de cette mise en scène tout à fait novatrice (ce sont des caméras de surveillance, vidéos sur le net, le caméscope de l'un des protagonistes, etc, qui filment le "documentaire"), Brian de Palma nous offre un questionnement sur les images, sur leur pouvoir sur le monde, un pamphlet contre la débilité de la guerre et la pseudo vérité que l'on nous sert quotidiennement sur un plateau. Ce film ne fait pas dans la délicatesse, la haine et la décadence des hommes atteignent leur paroxysme, l'horreur se déploie ici sans artifices. Il n'y pas de place pour le manichéisme, pas de "méchant GI vs populations civiles innocentes", ni de "vilains terroristes contre gentils occidentaux civilisateurs". Non, ici tout le monde est dans la même mouise, du gamin complètement déboussolé qui sait pertinemment qu'il sert de chair à canon à une guerre insensée (notez le pléonasme), aux civils complètement impuissants qui se font shooter sans raison et sans pitié. Cette vérité, elle fera 10 secondes dans nos JT ce soir, et puis nous retournerons tranquillement à nos occupations... Car au fond, "ce qui se passe là-bas reste là-bas" comme dirait l'autre. Ce film choc devrait être une piqûre de rappel, une oeuvre salutaire, ce ne sera finalement qu'un cri de résignation. Affreusement pessimiste, incroyablement vain, mais... effroyablement beau.