Que dire exactement de ce film unique, de ce véritable chef d'oeuvre de cette oeuvre qui ré-invente le cinéma ?
Au delà de l'émotion indescriptible que l'on ressent, (la peine mêlée à l'horreur, ainsi qu'à la révolte) il y a quelque chose d'incroyable dans ce film : sa forme en elle même. Tout dans ce film est "image", mais pas n'importe lesquelles. Ce sont celles que nous pourrions voir, que nous voyons parfois, ou celles qui vous sont cachées, qui nous appellent, mais qu'on ne voit pas. Il y a les images qu'on trouve aujourd'hui sur internet (de youtube aux blogs) à la télévision (le faux documentaire français, ou la télé irakienne), ou dans la caméra d'un jeune soldat qui voudrait n'être que spectateur, celui qui ne ferait que transmettre. Les points de vues sont multipliés, et on passe ainsi de celui des soldats, à celui des journalistes, ou simplement de celui d'une caméra de surveillance. Mais paradoxalement, il n'y a pas de réelle ambiguïté, puisqu'il s'agit non pas de juger, mais de démontrer, de nous faire voir l'horreur de la guerre, son idiotie, qui se répète.
Il nous est démontré surtout que ces images, nous spectateurs, nous devons les voir, et devrions agir, ne serai-ce que par l'acte de prise de conscience. Car ce film montre avec une habilité sans pareil les rouages de la mécanique de la manipulation. Comment on nous cache les choses, et comment on nous en fait croire d'autres. Jamais la bêtise des soldats n'est vraiment condamnée, contrairement aux responsables.
Sont condamnés les médias absents, les images pourtant les plus accessibles. Et biensur le gouvernement. La vérité est ailleurs, peut-être dans les larmes d'un soldat de retour dans son pays.
On ressort abasourdit, peut-être aussi grace/à cause des dernières images, succession de photographies de corps meurtris par cette guerre. Et, terriblement impuissants.