Il y en a qui signent des thrillers sous le signe de thématiques à caractère historique et/ou religieux, comme Ron Howard pour son "Anges et démons" en s’appuyant sur le roman de Dan Brown. Avec "Crimes à Oxford", Alex de la Iglesia porte sur grand écran le roman "Mathématique du crime" de Guillermo Martinez. Un sacré programme en perspective, même si le livre ne remporte qu’une moyenne somme toute honorable de 3,3/5 sur le site Babelio. Mais qu’en est-il du film ? Eh bien si je devais faire une critique facile, je dirai que le spectacle est plaisant, bien que le film souffre d’un léger manque de rythme, une carence principalement due à une mise en scène mollassonne et à un montage contestable qui amène quelques erreurs scénaristiques, les plus flagrantes se trouvant en début et fin de film. En réalité, c’est un thriller extrêmement bavard pour exploiter une théorie qui donnerait la possibilité d’approcher l’absolue vérité ; et cette théorie se rapprocherait tant et si bien de la philosophie qu’elle la tuerait sur le champ. Cher lecteurs, chères lectrices, si vous veniez à passer votre bac de philo cette année (ou dans les années qui suivent), je suis navré de vous apprendre que non, la philo n’est pas morte et qu’on n’a pas fini de se creuser les méninges dessus. Aussi, pour ceux qui l’ont déjà passé, je suis heureux que vous ne l’ayez pas passé pour rien. Quoique… Il n’empêche que le prologue est captivant, porté par un John Hurt toujours aussi charismatique, pour qui les dialogues ont été soignés aux petits oignons. Il se trouve confronté à Elijah Wood, qui ne s’en sort pas trop mal sans réussir à convaincre complètement. Cependant, la teneur des propos n’est pas suffisamment édulcorée pour la rendre complètement accessible aux non-initiés des mathématiques… euuuuh on va dire supérieures. Ne me demandez pas lesquels, je n’ai pas tout retenu car ça a été quelquefois du charabia pour moi. Mais c’est bon, j’ai toujours 5 doigts par main ! (jusque-là, ça va en maths). Les théories menées et expliquées restent malgré tout suffisamment intéressantes pour garder le spectateur dans l’attente de savoir qui est le vrai coupable dans ce scénario complexe. Oui, complexe car les diverses théories sont autant de pistes ouvertes sans qu’elles ne soient véritablement refermées à un moment donné ou un autre. A s’y perdre, mais curieusement on ne s’y perd pas vraiment, à condition toutefois de ne pas trop laisser errer son esprit lors des explications. Pourtant, on ne peut guère s’empêcher de penser que le film traîne un peu en longueur, jusqu’au dénouement de l’histoire hélas amené un peu trop facilement via une belle pirouette qui ne manque pas de surprendre.
Malgré tout, une question me taraude : lorsque Martin s’aperçoit que rien n’est écrit sur la serviette, et que de ce fait l’éminent Arthur Seldom ne connaissait pas alors le 3ème symbole, comment expliquez-vous que la serviette ait été pliée en… ? Regardez, observez, mais ce mystérieux symbole était là, à la vue de tous.
Ce qui ne gâte rien, c’est la sensualité qu’apporte Leonor Watling, d’autant plus que son personnage apporte du grain à moudre dans la psychologie des personnages, en particulier celle d'Arthur Seldom. Cependant on peut se questionner sur le démarrage hyper rapide de la romance. Je veux bien qu’on réponde au fantasme de nombreux hommes concernant les infirmières pulpeuses, mais bon… Si c’est comme ça, je veux bien aller faire du squash à Oxford durant mes prochaines vacances ! Plus sérieusement, l’ambiance est là, aussi curieuse et pesante que cette affaire : tout d’abord grâce à la bonne interprétation des acteurs (à l’exception de Dominique Pinon, toujours aussi mauvais, certes pas aidé par ses personnages tracassés), puis grâce aussi aux décors pourtant insuffisamment mis en valeur, et enfin grâce à l’éclairage qui offre de belles couleurs contrastées en milieu sombre. Rien d’exceptionnel dans tout cela, car si le tout est de bonne facture, il reste néanmoins assez banal. Un comble pour un sujet aussi audacieux et original que ce "Crimes à Oxford". C’est dommage, car ce long métrage avait un réel potentiel de chef-d’œuvre, malgré le fait que l’histoire ne soit pas vraiment cinégénique, ce dont le réalisateur avait pleinement conscience. Certes il a pris un risque, et on ne peut que le féliciter pour cela, et c’est la raison pour laquelle j’octroie un demi-point supplémentaire à son film. Mais ce risque ne s’est pas avéré vraiment payant. La preuve, ça en est presque ennuyeux, bien que le film joue assez habilement avec nos nerfs en nous plongeant dans une sorte de double impatience. D’abord parce qu’il nous tarde de savoir ce qu’il en est, et ensuite la moins glorieuse ; parce qu’il nous tarde que ça finisse.