Dans la brume électrique (In the electric mist), 2008, de Bertrand Tavernier, avec Tommy Lee Jones, John Goodman, Mary Steenburgen, Peter Sarsgaard…et avec Buddy Guy et sa guitare. D’après l’œuvre de James Lee Burke, transposée après le passage de l’ouragan Katrina. L’intrigue policière est beaucoup trop compliquée pour moi, avec une épuisante série de tiroirs qui s’ouvrent sans cesse, noyant l’intrigue dans un flux d’informations et de personnages, jusqu’à étouffer tout début de compréhension rationnelle. Mais au delà de l’aspect thriller, c’est l’atmosphère du film qui retient l’attention, l’ambiance créée par le cinéaste autour du flic, Dave Robicheaux, aussi complexe que son pays, la Louisiane. Le cinéaste français a formidablement réussi à capter le climat des bayous, la brume étouffante jusqu’à les rendre glauques, des paysages, des végétaux, des hommes de cette région qui n’a soldé ni son passé (esclavagiste, sécessionniste, raciste aujourd’hui), ni son présent, avec les dévastations de Katrina. Robicheaux, lui non plus, n’est pas au clair avec son passé, et son enquête sur des crimes sordides me semble en fait plutôt une quête, personnelle, sociale, politique, historique même. En ce sens, l’aspect policier n’est qu’une trame de fond pour dire des choses essentielles sur le pays Cajun, la Louisiane, et plus largement sur l’Amérique d’avant Obama. Le général confédéré qui surgit avec ses soldats blessés comme une hallucination d’alcoolique, illustre sous un angle fantastique, des réalités concernant les zones d’ombres, les colères, les violences latentes,les culpabilités et les douleurs qui se concentrent dans chaque petite paroisse du coin, dont le blues, comme la musique cajun est une expression artistique. Les fantômes du passé hantent la terre et les hommes et Tavernier nous permet de lever un coin du voile de cette brume électrique, poisseuse et vénéneuse, qui enveloppe la société mise en scène.