Autre incursion du talentueux Barbet Schroeder aux Etats-Unis. Celui-ci nous livre un polar soft, sobre, de facture très classique, prévisible, et réalisé platement façon téléfilms. Peut-être qu'à l'époque le film présentait davantage d'originalité. Mais à présent, de nombreux réalisateurs ayant rabâché maintes et maintes fois le sujet et ce qui tourne autour (mafia-police, lois du milieu, infiltration d'indics, corruption), on a l'impression de voir toujours le même film. La trame ultra banalisée de l'escroc au coeur tendre (le vol de voitures n'a rien de passionnant) qui souhaite se repentir, forcé de coopérer avec les flics pour incarcérer le truand local, devient écoeurante. Le point judicieux est de montrer les méthodes des deux clans (police-pègre), qui ont tendance à se rapprocher, avec une police et un procureur véreux. Une affaire d'hommes, virile (la belle Helen Hunt faisant de la figuration), qui se terminera inlassablement par un affrontement stupide et un happy-end conventionnel et niais où les gentils comme toujours auront le dernier mot (il faut insuffler de l'espoir et ne surtout pas surprendre ou même choquer les spectateurs...). Le casting est inégal : David Caruso, au centre du récit, est le plus souvent inexpressif, même si à de rares instants il dégage quelque chose (on n'est pas préoccupé par son personnage. Impossible d'éprouver de l'empathie) ; les bonnes surprises sont Samuel L. Jackson, toujours nickel, mais surtout Nicolas Cage dont la carrure et l'interprétation étonnent et dont l'instabilité morale et l'imprévisibilité qui en découle effraient. Une étoile pour lui, et deux étoiles car finalement on suit le film avec un certain plaisir, à condition d'être peu regardant. La sélection officielle hors-compétition à Cannes est hors de propos, bien abusive. Du même réalisateur, côté polars, préférez le tendu L'enjeu mais surtout le noir et âpre Calculs meurtriers. Le must sur ce thème est bien évidemment Les infiltrés, du maître Scorsese.