Marrant, il a fallu qu’on me parle récemment de ce film pour me rendre compte que finalement, je n’avais encore rien écrit dessus. Et c’est un exercice intéressant que d’écrire sur un film qu’on a vu depuis un petit moment. Parce que l’air de rien, à décanter mon sentiment avec autant de recul, je me rends compte que je garde quand-même plein de souvenirs positifs à l’égard de ce film. C’est malsain à souhait ; ça triture vraiment un aspect de notre rapport au corps sur lequel nous, individus, société, ne sommes clairement pas encore à l’aise. Et pourtant, malgré le souvenir d’une bonne introduction, très accrocheuse, et celui d’un ressort d'intrigue qui sait prendre aux tripes, je me rappelle bien être resté la plupart du temps bien dubitatif face au film, et l’avoir quitté sur un bilan plutôt morne. D’où venait le problème ? En y repensant bien, je me suis souvenu que le véritable problème venait d’une intrigue trop décousue, pas assez vraisemblable lors de sa première moitié et, qui plus est, sans véritable finalité à laquelle s’accrocher. Alors on me traitera peut-être de béotien ; de gars qui a besoin de son rail bien défini pour cheminer dans un film, mais je pense que pour le coup ce serait là se tromper sur mon compte. J’adore Lynch, quand au cinéma non-narratif en général, il ne me dérange pas. Par contre, pour ce film là, je dois quand même bien reconnaître qu’une logique m’a manqué. J’ai l’impression qu’Almodovar s’est trop rapidement lâché ; qu’au bout de dix minutes il s’est cru autorisé à faire un peu tout ce qu’il voulait, laissant libre court à son imagination, en se disant intérieurement que, de toute façon, le spectateur allait forcément le suivre dans son cheminement. Et cette impression là, je la forge sur le fait qu’en définitive, le film pose ses événements les uns à la suite des autres, sans forcément nous annoncer où il va, ni pourquoi il y va, si bien qu’au final on se retrouve face au fait accompli, sans qu’on sache vraiment quoi faire de tout ça… Alors après, quand je dis ça, je ne demandais pas à ce que l’ami Pedro nous tienne par la main et nous dise quoi penser et quoi comprendre. Seulement, je trouve dommage que l’expérience de ce film semble se limiter à un simple « c’est dérangeant hein ? » Pour moi le boulot n’est vraiment fait qu’à moitié. Ce genre de postulat très déstabilisant méritait qu’on en joue sur le spectateur, qu’on s’amuse avec sa logique en l’emmenant dans des cheminements qui nous auraient surpris. C’était l’occasion de nous explorer avec une histoire pareille. Almodovar ne le fait pas. Alors certes, il pose déjà son film là comme une vraie expérience sensorielle. Mais à mon sens, il aurait pu tellement mieux exploiter les temps que j’ai passé à rester dubitatif ou passif que je ne peux m’empêcher de rester sur ma faim. Rah ! Mais que c’est frustrant...