Almo a mis la barre encore plus haut. Déjà dans "Etreintes Brisées", il changeait de genre, voire même de style par rapport à Volver. D'avantage de glamour, mais aussi de violence, il passe au thriller violent. Il réalise ici son chef d'oeuvre. La Peau que j'habite, si on traduit en Français, mélange des tas de choses que les cinéphiles occidentaux ne peuvent que vénérer, des deux côtés de l'Atlantique. Le retour d'Antonio Banderas mais sans Penelope Cruz... Banderas y joue un personnage fort complexe, mais également très glamour. Il ressemble à certains moments, de part ses faits et gestes, son look, au Sean Connery des années 60. Sauf qu'il parle espagnol.
C'est un chercheur en chirurgie complètement malade dans sa tête, veuf.
Almo est toujours glauque, mais il y a là une Espagne chic, des appartements luxueux, de belles voitures, la maison de Dr Ledgard, le personnage de Banderas, comporte des
laboratoires que l'on dirait presque secrets, en sous-sol, avec des caméras partout. Quasiment l'esquisse d'une base secrète pour savant fou. Savant fou qu'il est, de toute façon. Il retient chez lui une femme. On apprend plus tard, que cette femme est un transsexuel, c'est en fait le jeune con qui a violé sa fille, séquestré pendant des années et opéré de force. Le film comporte un aspect d'anticipation. Dès le début, on nous place l'action en 2012, et Ledgard se présente comme un éminent médecin créateur d'une greffe de peau révolutionnaire. Officiellement. Officieusement, il utilise des méthodes illégales. Un personnage à la fois dérangé, guindé.
Une schizophrénie, où la folie furieuse se pare de Jean-Paul Gaultier, où la damnation humaine se veut médecine,
où le transsexualisme permet l'enlèvement parfait. Ou presque... à la fin Vera rejoint sa mère. On peut se douter que son discours sera crédible. Ledgard et sa domestique n'auront même pas le temps d'aller en taule. Vera les descend pour s'échapper.
Un thriller à la fois fou sur le plan de son déroulement et peut-être assez plausible sur le plan de l'anticipation. Almo ne remmetrait-il pas en question l'identité même du mouvement de libération culturelle dont il fait partie ? Le film est un grand suspense, avec des flashbacks. Serais-je naïf si je posais la question : vont-ils tous se mettre à copier Tarantino ? L'homme du flashback par excellence ? Almo est en train de changer. Avec "Étreintes Brisées", il annonçait la couleur. Avec "La Piel que Habito", il frappe.