Dans ce film sombre, tous sont victimes de l’inconscience et de la violence banalisée : enfants, femmes, hommes, et mêmes animaux (chien ou poulets).
Paul Haggis utilise peu les images chocs comme les auraient proposées Scorsese, Cronenberg ou John Woo pour dénoncer la violence ; il est plus subtil. Les trois crimes, la torture aux hommes et aux animaux, plus le suicide ne sont jamais montrés : la vue rapide d’un cadavre suffit à témoigner de l’horreur de la mort, les récits des protagonistes nous glacent.
Contrairement aux films sur le Viêt-Nam, dans lesquels les combattants étaient détruits psychologiquement par la rudesse du conflit, Dans la Vallée d’Elah n’excuse pas les actes des soldats par le stress dû au combat ; ceux-ci ne tuent ni par légitime défense, ni par nécessité, ils tuent « comme ça », comme dans un jeu d’enfant. La guerre agit comme révélateur de leur violence latente. Cette violence s’exerce d’ailleurs tout autant sur le sol américain - a priori en paix.
Haggis n’est pas un cinéaste gauchiste ; il ne critique pas le patriotisme ou les militaires (il souhaite néanmoins l’arrêt de la guerre) : il oppose le soldat honnête, droit, pudique (Tommy Lee Jones) aux soldats qui, au lieu d’incarner les combattants qui se sacrifient, pour une hypothétique libération des peuples, se plongent complaisamment dans tous les vices : mensonge, sexe, alcool, drogue, insultes, violence, torture (scène filmée avec son mobile - version hard du Happy Slapping), meurtre.
En effet, prêts à tous les renoncements pour de menus plaisirs, les militaires trahissent un secret pour un verre de bourbon, prennent une prostituée pour jouir, torturent pour s’amuser, ou abandonnent un ami aux chiens pour du poulet frit.
Au-delà du film, tout comme Haggis, nous, adultes, espérons-le responsables, assistons, impuissants et horrifiés, au remplacement d’adolescents, jadis gentiment rebelles, par des jeunes de plus en plus capables (et coupables) d’atrocités envers leurs semblable