Proche, dans l'émerveillement qu'il suscite quand entrent en contact des personnages avec la nature, du césarisé "Lady Chatterley" de Pascale Ferran, "Un coeur simple" est un premier film magique, poétique et saisissant, adapté d'un conte de Flaubert. Basculant comme toujours dans la déchéance humaine, l'auteur a signé une histoire belle et grave, déterminant en ce qu'il oppose différentes classes sociales, et émouvant quand il parle de la projection. Marion Laine, dont c'est le premier film, en a fait une illustration magique, ne cédant jamais sous le symbolisme facile. Une oeuvre portée par la majesté des cadres dans lesquels les ombres et les silences pesant sur les mots de Flaubert se déroulent. L'oeuvre est humainement difficile dans sa propension à amener le malheur (par la perte humaine, la perte de l'écoute, la perte de l'amour), à faire sombrer doucement ses protagonistes dans une douleur sans retour. Tous ces aspects ont été soigneusement abordés dans le film, qui garde en lui aussi l'idée qu'il s'agit là de cinéma ; Marion Laine ose une amplitude de mouvement, ne reste jamais scotchée à sa caméra à observer ses actrices en respectant chacune des lettres écrites par Flaubert. Et d'ailleurs, les actrices, admirables dans l'interprétation de la souffrance, font de leurs personnages des êtres forts, fauchés vifs sous les malheurs d'une destinée imprévue. Sandrine Bonnaire, au-delà de ses larmes, bouge naturellement avec ses tripes quand plus rien ne peut sortir de ses yeux (lorsqu'elle bascule dans la folie, on peut d'ailleurs remarquer dans la sonorité de sa voix des échos à celle de sa soeur autiste Sabine, à qui elle a dédié récemment un beau documentaire). Marina Foïs, effrayante puis bouleversante, démèle les attitudes bourgeoises avec un humour qui lui est propre. Toutes les deux s'évitent puis fusionnent dans un final pessimiste, d'une poésie immense, nostalgique d'un temps parfait. On y visite donc les profondeurs humaines, les tressaillements des âme