4 minutes a été nominé dans de nombreux festivals où il a remporté plusieurs récompenses : Meilleur film au Festival international du film de Shangaï, Prix du public au Festival de San Francisco, meilleur film et meilleur actrice pour Monica Bleibtreu et Hannah Herzsprung au German Film Awards.
L'idée du scénario de 4 minutes provient d'une photo sur laquelle Chris Kraus s'est penché : "Il y a huit ans, je suis tombé par hasard, dans un quotidien, sur la photo d'une vieille dame de 80 ans, professeur de piano. Elle était assise au piano, dans une cellule de prison. On la voyait de profil. (...). Elle avait l'air très forte, très masculine. Elle portait un chignon, qui était comme plaqué. Mon regard s'est promené sur ses mains posées sur le piano, des mains très tendres, très jeunes. (...) Les mains n'allaient pas avec le visage. Le piano n'allait pas avec la cellule. C'est sans doute en raison de ce décalage que cette photo m'a hanté. J'ai fini par comprendre que, derrière cette femme,dont le journal disait seulement qu'elle donnait des cours de piano en prison depuis 60 ans, devait se cacher une histoire de passion, de volonté et aussi de folie. Je l'ai peut-être seulement imaginé. Mais c'est ce qui est génial avec ces photos. La vérité est dans le regard de celui qui observe."
Chris Kraus a connu de nombreux problèmes financiers et de casting avant de pouvoir réaliser 4 minutes : "Le projet a mis huit longues années à aboutir. Au début, je ne devais pas réaliser le film, seulement écrire le scénario. (...) Puis, il y a trois ans, la société de production TeamWorx s'est présentée. Après le succès de Famille Brisée, on m'a confié la mise en scène de ce qui devait être une grosse coproduction franco-allemande. Jeanne Moreau était censée interpréter la prof de piano et on avait aussi pensé à quelqu'un d'autre pour le personnage de Jenny. Mais Mlle Moreau avait un emploi du temps très chargé. Nous nous sommes perdus de vue. Après le départ de cette star internationale, le financement du film a capoté et les gens de TeamWorx n'ont pas pu produire le film, faute de moyens. Mais ils sont intervenus pour que Kordes & Kordes Film prenne le relais et sauve le projet. Ce sont deux productrices incroyables, qui ont tout misé sur la production de ce film. Ce sont elles qui ont pensé à Monica Bleibtreu. Et c'était une idée de génie."
Trouver l'actrice qui devait incarner Jenny, s'est avéré très compliqué pour Chris Kraus : "(...) Nous avions auditionné 1 200 actrices, sans résultat, et six mois plus tard, j'étais à deux doigts de jeter l'éponge. Puis notre directrice de casting, Nina Haun, est arrivée avec une bande démo de Hannah Herzsprung incroyablement mauvaise. Je n'avais jamais entendu parler d'elle. Je n'étais pas chaud du tout. Mais Nina a insisté pour qu'elle fasse partie du casting. Et là, elle nous a bluffés. Par la suite, il y a eu un moment de panique, car, lors du casting, Hannah avait prétendu qu'elle jouait du piano à la perfection. Malheureusement, c'était loin d'être le cas. Quelques semaines plus tard, nous nous sommes aperçus qu'elle ne savait pas jouer du tout. (...) Mais comme elle voulait le rôle à tout prix, elle avait répondu " oui " à toutes mes questions ! (...) Finalement, lors du tournage, elle a parfaitement interprété les sonates."
L'actrice Hannah Herzsprung est la véritable révélation de ce film pour Chris Kraus : "(...) Cette actrice est un mélange étonnant de dévouement, d'ambition, de sincérité et de modestie. Elle a pris des cours de piano pendant six mois avec une assiduité remarquable. Elle a suivi un entraînement de boxe pendant quatre mois et a effectué elle-même toutes les cascades. On lui a même brûlé les mains. Pour la scène de la poursuite, elle s'est jetée une trentaine de fois contre une baie vitrée qui se trouvait au dixième étage d'un immeuble de bureaux à Mannheim. Entre elle et le vide, il n'y avait rien d'autre que du verre. Les cascadeurs eux-mêmes étaient mal à l'aise en la regardant foncer tête baissée contre la vitre."
Hannah Herzsprung s'est imprégnée de l'univers carcéral avant le tournage du film : "J'ai (...) visité des prisons, rencontré plusieurs détenues et parlé avec elles. J'ai un souvenir particulièrement vif d'une rencontre avec une femme infanticide. Je suis allée voir la prison de Luckau, dans laquelle nous avons tourné,avant le début du tournage. Le bâtiment était vide pour cause de travaux de réfection et j'ai ainsi pu y passer une demi-journée, avec trois surveillants. Je me suisinstallée dans une des cellules et j'ai lu ce que les détenues avaient griffonné sur les murs. Ce qui m'a laissé une impression durable, c'est le fait de regarder à travers les barreaux. On avait vue sur les immeubles d'en face. Des rideaux colorés, des enfants qui riaient. Absurde."
Monica Bleibtreu a été vieilli pour les besoins du film : " (...) Dans ce film, l'apparence et l'aura de mon personnage sont à mettre au crédit de la très belle photographie de Judith Kaufmann, qui, en jouant avec les rides de mon visage, a su faire ressortir quelque chose de spécial. Sans oublier le maquillage, très soigné."
Chris Kraus a souhaité centré son film sur la musique : "Dans 4 minutes, je voulais que la musique soit un élément majeur. Non pas comme une fin en soi, mais comme un contrepoint au monde sordide que l'on devine chez les deux héroïnes. Il n'était pas question de bâcler la musique."
Le réalisateur, Chris Kraus, n'a pas trouvé lors de son casting, des musiciennes qui soient bonnes actrices : "Nous avons longtemps envisagé de confier les rôles principaux à des musiciennes professionnelles, (...). Mais je n'en ai trouvée aucune qui possédait en même temps le potentiel dramatique nécessaire pour interpréter ces rôles difficiles."
Chris Kraus a rencontré beaucoup de difficultés pour trouver la musique adéquate du concert final : " (...) Dans le scénario, il était écrit : " Une musique fantastique s'élève, qui relègue Schumann au rang de nullité. " Essayez de trouver, en Allemagne, un compositeur prêt à massacrer Schumann ! Nous avons demandé à tous les compositeurs de musique de film allemands sans exception. Et les mois défilaient. Trois semaines avant le début du tournage, alors que nous étions tous au bord de la crise de nerfs, la radio bavaroise nous a donné le nom d'Annette Focks. Laquelle s'est enfermée deux jours dans le studio et nous a concocté le morceau. Nous l'avons repris tel quel. (...) Puis nous avons engagé Kae Shirati, une des meilleures pianistes allemandes, qui avait la même corpulence qu'Hannah et qui pouvait lui servir de doublure." Afin d'obtenir un résultat satisfaisant, Hannah a en partie été doublée :"Nous avons mis au point une chorégraphie dont Hannah s'est ensuite inspirée, ce qui, au passage, est déjà une performance en soi. En guise de répétition générale, nous avons fait jouer les deux femmes, habillées de la même façon, de façon synchrone sur deux pianos à queue devant 300 figurants au théâtre d'Oldenbourg. On aurait dit un mélange de guerre et de ballet aquatique. Cette répétition a certainement été le moment le plus beau et le plus émouvant de tout le tournage."
La scène du concert final a nécessité un très gros travail de prises de vue et de montage, comme Chris Kraus l'explique : "Le concert final a nécessité plus de 50 plans : on a atteint un "shooting ratio" de 76. Même pour une pub Coca Cola, on ne tourne pas autant. Pour les huit minutes que dure la scène finale, nous avions presque dix heures de rushes. Uta Schmidt m'a dit : " Soit nous passons deux mois ensemble sur cette scène dans la salle de montage, soit tu me laisses un jour toute seule et je m'en occupe. " J'ai opté pour la deuxième solution."
Le réalisateur a pris soin de choisir la musique qui correspondait le mieux au personnage de Traude : "A l'origine, le film s'intitulait "Rien que pour Mozart". La vieille enseignante de piano était une fan de Mozart et devait jouer uniquement l'oeuvre de ce compositeur. Mais nous avons dû revoir cette approche. Je trouvais que les sonates de Mozart ne correspondaient pas vraiment au tempérament de Traude. J'ai écouté des CD de piano du matin au soir pendant quatre semaines, (...). Finalement, j'ai fait une sélection de morceaux en fonction de mes goûts personnels. De Mozart, nous n'avons retenu qu'un rondo relativement inconnu et la célèbre sonate en la majeur. Nous avons également choisi la sonate pour piano opus 53 de Beethoven, pour sa virtuosité technique. Nous avons pris une fugue de Bach.Le concert en la mineur de Schumann convenait parfaitement parce qu'il est un peu ridicule au début. Enfin, Schubert était l'alter ego de Traude. J'ai écouté ses impromptus en la mineur à une heure du matin. Je me les suis passées une trentaine de fois à la suite. J'ai aussitôt compris que c'était le thème de Traude. Ou plutôt, son essence."