Une œuvre magistrale et complètement psychédélique. C'est à la fois un témoignage sur les années 60 et un polar génial où la schizophrénie du personnage de Walker est mise en scène avec la précision d'un entomologiste. Lee Marvin est formidable dans ce rôle, et Angie Dickinson, un sublime faire-valoir. Enfin, "Point Blank" est aussi un film d'une grande modernité, par l'utilisation des prises de vue et un montage sans temps mort, même si les retours en arrière ne sont pas tous indispensables.
Un très bon thriller magnifiquement filmé er porté par des acteurs sublimes un économie de moyens et de dialogues qui renforcent la mise en scène et nous tiens en haleine jusqu'au bout
Un classique du polar sec et sans fioritures, un peu froid (aucun des personnages n'inspire de sympathie) mais très efficace et réalisé avec brio par John Boorman, qui confirmera l'étendue de son talent dans ses films suivants.
Un incroyable polar minimaliste qui ne s'embarrasse pas de psychologie, d'une violence radicale. La mise en scène décousue est pleine de subtilités, superbe photographie et un Lee Marvin impérial dans ce rôle extrêmement monolithique, presque monosyllabique.
Polar vintage & élégant qui évite le montage hystérique de son remake et/ou les clins d'oeils faciles. Ici, la distance avec l'intrigue principale est savamment dosée et des traitements décents réservés aux rôles: La dimension tragique du héros Walker/L.Marvin devant combattre l'infamie du mensonge est crédible et le romantisme toc d'une sombre organisation pourvoyant à tous les souhaits de ses membres n'est pas présent, d'ou l'absence de routine du film de + le personnage rare de Caroll O'Connor en jeune lesbienne fille à papa et autoritaire est simplement remarquable; sympa.
Dès le commencement, alors que l'image nous parvient à peine, des coups de feu retentissent, prévenant ainsi la violence du film. Violence qui se fait finalement moins ressentir par les actions du personnage désabusé de Walter (superbe Lee Marvin) que par la composition des plans géniale de John Boorman. Ajoutez à cela un montage brut qui sait faire monter la tension (voir la scène du bruit des pas de Marvin) et une charmante Angie Dickinson, et vous obtientrez l'un des films noirs les plus virtuoses et les plus brutals de l'histoire du cinéma !
Au premier regard un film noir mais on sent derrière les codes du genre une réflexion sur la folie du monde moderne, une vraie radiographie de ce qu'est devenu le capitalisme (Walker au départ est un employé, il est exploité, utilisé par un certain Reese...).
Le combat de Walker, la façon qu'a notre héros de tirer un fil qui ne semble jamais finir face à un monstre insaisissable, sans visage, en font une métaphore parfaite.
Le point de non retour, film visionnaire sur la crise économique mondiale qui un an plus tard commençait et semble hélas ne jamais pouvoir s'arrêter depuis...
Le film qui propulsa John Boorman vers les sommets. Un thriller froid, déshumanisé, aux images sublimes qui rappellent un peu le style d’Hitchock dans « Sueurs Froides » ou « La mort aux trousses ». Comme toujours dans ces années soixante l’individu fait face à des organisations plus ou moins occultes dont on ne sait jamais très bien qui les dirigent. Lee Marvin est lui-même difficilement identifiable. D’où vient-il ? Quelle est sa profession ? Toujours est-il qu’il est très en colère après avoir été dupé par son meilleur ami qui en plus de sa part du butin lui a pris sa femme. Et l’on sait bien qu’il ne faut jamais mettre Marvin en colère. Homme seul face à l’organisation, il en viendra à bout ce qui est plutôt rare dans les films de cette époque où le héros est souvent broyé au final par la machine. Il faut dire qu’il a dans la manche la toujours délicieuse et sensuelle Angie Dickinson. Une réussite du genre qui installe tout de suite Boorman parmi les grands. La suite ne démentira pas ce premier opus.
Boorman allie le geste à la pensée et réalise avec "Point blank" un véritable manifeste cinématographique et politique. S'inscrivant dans la mouvance du nouveau-cinéma américain de la fin des années 60, le film s'aventure cependant très loin dans l'expérimental et révèle les incroyables talents formalistes de son réalisateur. Le sujet du film est évidemment la violence : celle, ontologique, de l'homme, mais aussi celle de la société et plus particulèrement du capitalisme ("L'Organisation" fait d'avantage penser à une multinationale qu'à la Pègre). En grand moraliste, Boorman se refuse à esthétiser cette violence (contrairement à Peckinpah), mais en fait une force tellurique qui secoue le film dans ses fondements mêmes : la temporalité explose, le récit est déconstruit (fulgurance d'un montage a-chronique qui inspirera plus tard Soderbegh pour son "Anglais") et l'espace filmique subit les assauts irationnels de cette énergie pure (l'image se fige, le même décor change d'un plan à l'autre, etc.). Autant que ce flux de violence, c'est aussi bien sûr l'intériorité de notre héros qui vient ainsi irriguer la matière filmique : "Point Blank" est un grand film mental. Il dresse le constat terrible que nous nous construisons tous nos propres prisons. Celle de Walker est sa soif de vengeance, mais elle pourrait être n'importe quelle autre "passion" (comme celle de réaliser un film : on sait à quel point Boorman aime se lancer des défis à priori insurmontables). Proche d'un "cinéma total" qui s'adresse avant tout aux sens et à l'inconscient, "Point Blank" est un des premiers sommets de l'oeuvre de Boorman (bientôt suivi par Delivrance), immense réalisateur, un peu trop oublié de nos jours... Avec ce film, il réussit l'exploit de faire se rencontrer avec bonheur le polar et Resnais.
Contrairement à ce qu'on pourrait facilement penser, Le Point de non-retour est loin d'être une série B. Tombé dans l'oubli parce qu'il s'agit d'un thriller aussi inhabituel que surprenant, il est en revanche plus réussi que Délivrance, réalisé 5 ans plus tard. La fin inattendue caractéristiques à John Boorman peut décevoir le spectateur, mais cette déception éventuelle est largement compensée par un enchaînement de scènes fortes à un rythme prenant. Le héros Lee Marvin effraie même ses ennemis les plus dangereux. Le traqué devient le traqueur, les rôles s'inversent et le spectateur ne sait plus que penser. Le héros, bouleversé par toutes les trahisons et vexations qu'il a subies, est devenue une machine vengeresse, aussi effrayant que l'Organisation dont il a juré la perte.
Thriller sec et âpre de John Boorman, leçon de manipulation... Lee Marvin, déja star, devait garder un oeil sur le jeune Boorman... mais il s'inclina devant le talent de ce dernier!
« Le Point de non-retour » se refuse à la caractérisation et à la psychologie, réduit la motivation à l’essentiel et débouche naturellement sur la fable. La valeur explicative des nombreux flash-back est mince : l’essentiel qu’ils nous livrent n’est ni psychologique ni narratif, mais poétique. La construction circulaire du récit achève d’ailleurs de conférer à l’ensemble une impression d’irréalité, comme d’une réalité filtrée par le songe. Pris dans les tourbillons d’une tempête qu’il a lui-même provoquée, Walker n’échappe pas à son cauchemar. L’impression onirique est accentuée par le dédoublement de la femme de Walker qui, morte, semble se réincarner dans sa sœur (leur ressemblance est recherchée par Boorman). Comme dans un rêve aussi, les évènements échappent au dernier moment à celui qui les vit. Car Walker, tout en ayant l’attitude et les gestes de l’implacable meurtrier, ne tue jamais. Il n’est qu’un pion dans un ensemble immense (le capitalisme ?) qui l’utilise, qui récupère même ceux qui s’opposent à lui… La quête d’argent de Walker est un motif dérisoire ; plus profondément, il veut arriver à la source du pouvoir de cette mystérieuse « Organisation » qui a toutes les apparences de la légalité WASP ; centre qu’on ne peut jamais atteindre. Renforcé par l’abstraction des décors (où l’homme apparaît toujours écrasé par les infrastructure ou perdu dans le labyrinthe architectural), le film tout entier contribue ainsi à nous donner une vision au bord du fantastique d’une Amérique pourtant très réelle. La description lyrique par Boorman d’un pays qui semble ne trouver d’issue que dans la violence rappelle celle d’Aldrich dans En quatrième vitesse. Là aussi, à partir d’un ouvrage de peu de poids, nous était contée une fable apocalyptique. La société secrète a remplacé « la chose », la stabilité inébranlable succède à la destruction finale, mais Walker, comme Mike Hammer, n’en est pas moins un chasseur d’ombres à la recherche d’un Graal inaccessible, entouré du même cortège de forces obscures et maléfiques, d’images de mort et de peur. Dans l’impossibilité pour Walker de vaincre sa névrose, de sortir du climat hallucinant et asphyxiant où il vit, il y a le goût d’un échec amer. C’est le mérite de Boorman d’avoir su être aussi allusif, de nous avoir livré en en préservant le mystère une fable du 20ème siècle ; la morale est détruite, la corruption règne sous les surfaces lisses et une surenchère de violence ne débouche que sur les ténèbres d’une prison où les gardiens sont inutiles.