Une excellente surprise que cet excellent film d'animation qu'est "Dragons", aussi bien prenant pour les adultes que pour les enfants, et que je regrette de ne pas avoir vu plis tôt. C’est l’adaptation d’un roman pour enfants écrit par Cressida Crowell publié en 2003. L'histoire racontée est celle de Harold, jeune Viking peu à son aise dans sa tribu où combattre les dragons est le sport national. Sa vie va être bouleversée par sa rencontre avec un dragon qui va peu à peu amener Harold et les siens à voir le monde d’un point de vue totalement différent... C’est une histoire d’heroic fantasy convenue, avec un scénario classique, mais très efficace, avec un rythme extrêmement soutenu. Il y a un bon équilibre entre l’humour et le drame, et ce film est très équilibré entre l’aspect de blockbuster épique d’action et son aspect émotionne plus intime. "Dragons" nous plonge dès le départ dans un conflit psychologique familial demeurant entre le personnage principal Harold, qui cherche à faire sa place dans un monde barbare de Vikings chasseurs de dragons et son père Stoïk, chef du village ayant des doutes quand à la place que souhaite choisir son fils. Cette relation père/fils déjà visitée dans de nombreux films d’animation n’est en fait qu’une jolie toile de fond qui nous emmène vers le thème principal qui à mon sens est l’amitié. Ce que l’on retient du film est en effet cette jolie naissance d’une relation d’amitié entre Harold et Krokmou une furie nocturne, redoutée de tout le monde. Les bons sentiments sont bel et bien au rendez-vous, et bien plus que dans les anciens films des studios Dreamworks Animation à mon avis, même si cette relation n’entraîne finalement que peu de rebondissements. On suit l’évolution de ces deux nouveaux amis en étant paisiblement charmé par la magie qui opère entre eux. Le dragon se révèle avoir un comportement et des attitudes dignes de tous nos animaux de compagnie réunis. L’humour du film est assez enfantin et on se laisse prendre au jeu qui met en scène des personnages forts en caractère tout droit inspirés d’une cour d’école et qui surenchériront le comique de certaines situations. Les dialogues sont en adéquation avec le public visé sans trop de sous-entendus qui plaisent au public adulte comme on en avait l’habitude avec la saga des "Shrek" par exemple. Notre personnage principal rencontre donc l’amitié mais aussi l’amour avec le personnage d’Astrid qui nourrit une nouvelle source conflictuelle entre l’ami et l’être aimé, conflit encore une fois pas très original mais qui se veut efficace et nous attache d’autant plus aux personnages. Ainsi nos personnages évoluent à travers un processus d’initiation au combat contre des dragons et d’immenses batailles qui les mèneront jusqu’au combat final où chacun trouvera sa place à la fois pour vaincre le mal mais aussi dans leur vie personnelle. On est bel et bien dans un film de dragons avec des scènes de combat épiques et très proches des jeux vidéo actuels. Je tiens aussi à insister sur deux points scénaristiques se dévoilant à la fin de l’histoire, le premier étant l’explication de la férocité des dragons où l’on comprendra que même pour les méchants il existe des méchants. Ainsi le mal vaincu à sa source rétablit les choses dans le bon sens, un peu comme l’avait déjà raconté Michel Ocelot lorsque Kirikou retire l’épine du dos de la méchante sorcière Karaba, lui retirant en même temps toute méchanceté. C’est une manière de faire comprendre qu’à chaque mal une cause et une solution existent si l’on se donne les moyens de les chercher. C’est finalement une jolie leçon de morale, qui je pense quand même dans "Dragons" trouve beaucoup moins d’efficacité que dans "Kirikou". Le deuxième point est le thème du handicap que je trouve très intéressant et très original pour ce genre de film, mais qui sous l’allure de blessures de guerre perd un peu de son charme. En effet Krokmou est
victime d’un handicap sur la moitié de sa queue l’empêchant de voler et notre ami Harold qui en est responsable y trouvera une solution grâce à l’invention d’une prothèse artisanale, et c’est finalement lui qui finira par perdre une jambe au combat et à en avoir besoin d’une à son tour
. Ensuite tout d’abord en ce qui concerne les personnages je trouve que le stéréotype un poil caricatural donné par les designers aux personnages secondaires (la belle blonde, le gros lourdaud, etc…) fonctionne très bien et on en saisit d’autant plus vite leur caractère. Sans rien de très innovant, on reconnaît vite qui est le chef de qui est méchant, et qui est l’idiot. Notre personnage principal est tout maigrelet comparé aux autres, ce qui le renforce dans son sentiment de faiblesse. Je trouve cependant les Vikings très proches dans leurs traits des guerriers nains tirés de jeux vidéo ou de films fantastiques. En ce qui concerne les dragons je trouve que le sujet étant traité depuis bien des années, leur look cartoonesque est très innovant et vraiment visuellement magnifique, créatif et original. En ce sens les allures de Krokmou ont pour effet d’à la fois nous impressionner et nous charmer. Les différences de tailles entre les dragons qui ne reflètent pas tout le temps leur puissance mais plutôt leurs particularités est aussi très sympathique. On n’est pas à chaque fois devant des monstres énormes cracheurs de feux. Concernant les décors, le travail de recherche est remarquable, l’impact visuel en reste très saisissant voir renversant lors des scènes de voltiges, et ce réalisme et ce style nous met quand même encore la bouche ouverte devant certains plans très impressionnants visuellement. Le tout est sublimé par des lumières et des couleurs qui sauront donner de l’intimité ou au contraire de la grandeur aux plans qu’ils nourrissent. On apprécie autant le coté intime des plans mettant en scène les relations entre le jeune garçon et son nouvel ami dragon que ceux des combats et des scènes de voltiges qui rendent efficacement service à l’histoire et aux personnages. Justement, en ce qui concerne les personnages, ceux-ci se révèlent tous intéressants et attachants. Harold est le prototype du héros maladroit, timide et craintif, qui se révélera de plus en plus courageux et fort au cours du film. Il y a aussi le personnage du père de Harold, qui n’aime pas trop son fils au début mais qui va petit à petit le reconnaître et lui avouer sa fierté d’ailleurs à la fin du film. L’autre personnage intéressant est clairement Krokmou, dragon rejeté tout comme ses semblables, handicapé, drôle, touchant, très attachant. Le personnage d’Astrid, lui, est un personnage féminin intéressant, c’est un personnage de femme forte et badass, qui sait se battre, qui est autoritaire, autonome et courageuse, qui ne sert pas juste qu'à être l’amoureuse du héros et qui ne sert qu’à ça. Le reste des Vikings est très sympathique, ils sont tous assez drôles et sympathiques chacun à leur manière, les adultes comme les enfants et les jeunes. C’est au final un très beau conte de fées sur une amitié touchante entre un dragon et un jeune humain, sur un fond léger d’handicap. Rien ne semble faire défaut dans la réalisation, mais on n’y trouvera rien de très novateur non plus, le film répond à tous les codes et règles des films d’aventures et il se place déjà parmi les meilleurs des studios Dreamworks. Pour ma part j’ai passé un vrai bon moment dans ce film et c’est ce qui compte le plus. Je reprocherai juste de ne pas avoir poussé un peu plus loin le thème de l’amitié et la psychologie des personnages. L’humour bien qu’enfantin ne rend pas du tout le film niais, bien au contraire, et j’imagine très bien les enfants qui en sortant ne peuvent que rêver une fois de plus à chevaucher dans le vent un dragon. On assiste encore une fois à un héros faiblard au début puis poussé au rang de superstar à la fin (ça pourrait être une définition du rêve américain ça, mais sous des thèmes comme celui de la compassion lorsqu’il décide de ne pas tuer le dragon en furie alors que tout le village n’en attendait pas moins, et celui de l’amitié naissante entre deux êtres différents et à la base ennemis). Ce sont des valeurs que je juge saines surtout sur un léger fond de handicap, et même si les enfants n’en retiendront sûrement que les combats extraordinaires, les répliques humoristiques et les fameux dragons, ce qui est très bien calculé pour tout le côté marketing qui suivra le film, les parents se sentiront rassurés de voir leurs enfants devant un film moralisateur et sans mauvaises pensées. Bref, ce film est presque parfait. On l'a vendu uniquement pour ses scènes d'action mais c'est bien dans ses personnages que "Dragons" trouve sa force. En effet, toute la première partie du film est concentrée sur l'évolution psychologique et les relations entre les personnages. On a aussi une réalisation incroyable qui offre des plans visuellement magnifiques et grandioses, mais également des moments plus intimes qui restent éblouissants, une histoire superbe qui aborde des thèmes rarement vus dans un film d'animation car étant réellement adultes, comme le rejet de toute une société pour ce que l'on est et une amitié interdite avec un dragon noir (métaphore de l'évolution du racisme). La seconde partie offre quant à elle des moments si épiques qu'ils restent les plus grands moments de courage que je n'ai jamais vu au cinéma. Entre une amitié touchante, une réalisation splendide et surtout, une bande-son incroyable, ainsi qu'une animation splendide détaillée et très fluide, "Dragons" est un presque un chef d'œuvre, un excellent film d'animation en tout cas, qui plaira aux jeunes pour son action grandiose et aux plus vieux pour sa réflexion adulte sur la société. Un film à découvrir impérativement, peu importe son âge