Eurociné n’étant pas connu pour y mettre les formes, on peut clairement dire que l’on savait à peu près à quoi s’attendre de la part de Pierre Chevalier (Viol, la grande peur - 1978). Cependant, cela n’empêche pas ce dernier de constamment nous surprendre durant les 60min que dure ce film.
Remettons-nous dans le contexte, dans la France du début des années 70, l’avortement est un acte illégal et donc condamné pénalement (article 317 du code pénal, loi de 1920). Il faudra attendre le vote de la « loi Veil » du 18 janvier 1975 pour que l’avortement soit enfin dépénalisé. C’est Simone Veil, alors ministre de la Santé, qui permettra à l’IVG (l'interruption volontaire de grossesse) telle que nous la connaissons, de voir le jour et ainsi, permettre aux femmes de jouir d’une liberté qui leur avait été refusée jusqu’à présent.
Quelques années auparavant, des mouvements militants voyaient le jour pour que la loi change en faveur de l’avortement, c’est dans ce contexte que le film a vu le jour. Sauf que Pierre Chevalier n’y va pas avec des pincettes et réalise ici un film racoleur et dénué d’empathie.
Le film narre l’histoire de Sophie, une jeune femme naïve victime d’un viol. Cette dernière tarde à l’annoncer à sa mère et auprès de la police. Elle ne préviendra sa mère qu’une fois qu’elle sera enceinte. Cette dernière se démène pour trouver une personne susceptible d’accepter de pratiquer un avortement sur sa fille mais dans la France 70’s, rares sont celles qui l’acceptent. Elle ira jusqu’à se rendre à Londres pour demander de l’aide à un médecin.
Dès le début, le film dévoile ses défauts et ils sont nombreux. Les personnages sont antipathiques, font la gueule et s’avèrent bien trop calme par rapport à la situation (par exemple, Jacques est impassible alors que sa petite amie vient de subir un viol). Sophie à un comportement irrationnel (à défaut d’aller prévenir la police, elle retourne sur le lieu du drame pour s’expliquer avec son violeur. En l’absence de ce dernier, elle se fait de nouveau violer par un autre type !). Sophie parait tellement naïve (pour ne pas dire, conne) et déconnectée de la réalité (au point de faillir subir un 3ème viol par la suite !).
Très maladroit tant dans le fond que dans la forme (le film voulait dénoncer le côté "aliénant" de la triste existence de Sophie avec sa litanie en voix-off « métro-boulot-dodo », sauf que le résultat s’avère plus ridicule qu’autre chose). Sans oublier que durant tout le film, si l’on accable la victime (toute la culpabilité repose sur elle, le fait qu’elle ne soit pas aller voir la police et pire, qu’elle se soit fait avorter), pas une seule fois, quelqu’un ne cherchera à s’intéresser au coupable. Certes, la police à chercher vaillamment à savoir qui avait pratiqué l’avortement illégal, mais absolument pas à savoir qui l’avait violé. Ajouter à cela, une musique totalement hors de propos et en incohérence avec l’ambiance du film (imaginez une musique de kermesse pendant une scène de viol ou d’un avortement clandestin), ainsi qu’un montage WTF (notamment lors du procès).
Si le film voulait être un manifeste contre le viol, c’est totalement raté. Certes, le film dépeint parfaitement le poids de l'auto-culpabilité des femmes à cette époque et de cette mentalité très 60/70’s, l’ennui c’est que l’ensemble s’avère terriblement maladroit et contre-productif (puisque le film insiste énormément sur la culpabilisation de la victime, bref tout ce qu’il ne fallait bien évidemment pas faire).
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