Cleaner
Un film de Renny Harlin
Renny Harlin n’a jamais fait dans la dentelle. Cliffhanger, 58 minutes pour vivre, ou encore l'Ile aux Pirates, voilà autant d’exemples de son attirance pour le divertissement grand public.
Dans Cleaner, il exprime une autre facette de son métier, et retrouve pour l’occasion un comédien qu’il connaît bien, Samuel L. Jackson, puisque déjà dirigé à deux reprises, en 1996 dans le méconnu Au Revoir A Jamais, et en 1999 dans Peur Bleue, version gros requins et non pas loup-garou. Si son nouveau film se rapproche un tant soit peu d’une de ses précédentes mises en scène, c’est certainement du côté d’Au Revoir A Jamais qu’il faut regarder. Même mystère, même amnésie sélective de son personnage principal, qui cherche à oublier le passé afin de se construire une nouvelle vie. Mais au-delà de ses aspects, Cleaner s’apparente plutôt à une nouvelle direction que Renny Harlin a choisi d’emprunter.
Il est ici question d’un ancien flic, Tom Cutler, supposé honnête, reconverti depuis plusieurs années dans le nettoyage en tout genre, de la personne âgée découverte morte depuis plusieurs jours par un parent venu lui rendre visite, à la scène de crime avec sang sur le carrelage et débris humains un peu partout. Sa petite entreprise ne manque pas de clients, car, comme le précise avec humour le prologue, «quand les ambulances repartent avec le corps, elles laissent tout le reste sur place ». Il peut donc s’agir de faire le ménage dans une maison abandonnée peuplée d’une tribu de chats ou de nettoyer une salle de bains ayant été le théâtre des derniers instants d’un candidat victorieux au suicide. La routine, pour cet ancien policier un rien blasé par tout ce qu’il voit, et dont l’unique imprévu réside dans les rapports qu’il entretient avec sa fille unique. Elévée seule par son père depuis la mort tragique de sa mère huit années auparavant, celle-ci cerche à comprendre ce qui est réellement arrivé ce jour-là, ce drame que Tom a choisi d’occulter pour prendre un nouveau départ. Mais la papa est têtu, et devra être bousculé avant de donner sa version des faits.
Appelé sur une scène de crime ordinaire, Tom va faire son travail, comme à son habitude. Seul petit problème, il se rendra compte le lendemain en se rendant sur les lieux, qu’aucun crime n’a été signalé, et qu’il a donc, sans le savoir, effacé toutes les traces d’un meurtre bien réel. Piégé, Tom doit bien vite retrouver ses réflexes d’antan s’il ne veut pas jouer le rôle du coupable idéal. On cherche à le « charger », mais qui, et surtout pourquoi ?
Le capital sympathie du film tient à deux éléments. Ses interprètes, et une histoire un brin surannée. Dans le rôle de Tom Culer, Samuel L. Jackson (auquel la version française ne rend pas grâce, et ce n’est rien de le dire) incarne un personnage maniaque, encore marqué par une tragédie, et donc terriblement humain. Le comédien ne se dépare pas de sa sobriété, et donne la réplique à un Ed Harris aussi irréprochable qu’à son habitude, et dont la prestation renvoit à celle qui fut la sienne dans le Gone, Baby, Gone de Ben Affleck. Le film sera également l’occasion de croiser le trop rare Robert Forster, et de constater qu’Eva Mendes est parfois encore associée à son image de fille pour les magazines de mode. Au service d’une histoire qui nous renvoit plusieurs décennies en arrière, la distribution ne paraît pas anachronique, bien au contraire, et fait pardonner sans trop de mal les vingt dernières minutes du film, qui éprouvent bien des difficultés à faire le lien avec ce qui précède.