Sujet original et ambitieux que de situer une enquête policière dans un institut pour malades d’Alzheimer menée par un ancien policier à la retraite lui-même atteint de la maladie. A partir du moment où nous intégrons que c'est totalement invraisemblable dans la réalité, et que nous sommes au cinéma et que dans cet état de fait tout est possible, le sujet s'avère atypique et vraiment gonflé. Ce qui est assez rare pour être souligné, dans un cinéma français qui a peine à faire preuve d'inventivité dans les sujets abordés.
Le problème ne vient donc pas du sujet, ni du jeu des acteurs (Marthe Keller, Aurore Clément, Gilles Gaston-Dreyfus, Philippe Laudenbach...), tous crédibles en malades d’Alzheimer (ont voit qu'un travail de documentation sérieux a été fait sur le sujet lors de la préparation et l'écriture du film)ni de l'excellence du talent d'André Dussollier a retranscrire avec subtilité et intelligence les émotions, angoisses et réactions d'une personne dont la mémoire se dégrade très vite, mais qui dans un élan de survie "mémorielle" reprend vite ses réflexes d'enquêteur tourmenté. Ce genre de rôle est un cadeau pour un acteur de sa trempe, capable de se fondre dans tous types de personnages.
En fait le problème vient de la mise en scène sans inspiration de Nicolas Boukhrief qui peine à insuffler de l'énergie à l'ensemble. Le rythme s'amenuise au fur et à mesure que l'histoire avance malgré le un sujet en or qui aurait pu lui inspiré une mise en scène rythmée et haletante. De plus, du point de vue technique et esthétique on se situe du côté d'un téléfilm qu'on aurait tourné pour France Télévisions avec cahier des charges sérré pour un budget chiche en moyens. Donc, je me dit que s'il avait eu bien plus de moyens, le film aurait eu une autre dimension que celle d'être honnête et de vouloir nous divertir.
Autre point, le côté expéditif de la résolution de l'enquête, qui manque pour le coup singulièrement d'originalité dans le traitement, ce qui gâche pour beaucoup l'appréciation positive que l'on pouvait avoir des trois quarts du film. Le suspense tombe à plat, alors qu'il y avait matière à en créé de manière angoissante, sans nous faire comprendre très vite qui est le coupable de cette série d'assassinats mystérieux...
Une déception pour un film très original et ambitieux, dont on se plaît à imaginer ce que cela aurait été si un Clouzot, un Chabrol ou même un Polanski avait été derrière la caméra.
En fait, j'ai compris, Alzheimer a atteint Boukhrief peu à peu lors de l'écriture du scénario et de la composition de sa mise en scène, avec une phase finale difficile et fulgurante...