Ayant reçu un accueil plutôt positif du public à sa sortie, The Mist mérite clairement son petit succès. Il s'agit de la troisième adaptation long-métrage de Stephen King sous la direction de Frank Darabont, lequel a également supervisé la réalisation du superbe La Ligne verte (1999) et Les Évadés (1994). Un réalisateur que vous connaissez sans aucun doute pour être à la tête de la direction de la première saison de la série The Walking Dead. C'est donc avec un plaisir non contenu que nous pouvons retrouver au sein du casting Carol (Melissa McBride), Andrea (Laurie Holden) et Dale (Jeffrey DeMunn), plusieurs des acteurs fétiches de Frank Darabont.
En étroite collaboration sur ce projet avec Stephen King (Collaboration qui dure depuis son adaptation en court-métrage de la nouvelle The Woman in the room en 1983), The Mist se présente comme une adaptation assez fidèle du roman et en adéquation avec l'univers de l'auteur.
La scène d'ouverture se permet même un gros clin d’œil à l'énorme projet de Stephen King qui a su réunir des milliers de fans en mode Game of Thrones, la saga de romans dark-fantasy à succès : La Tour sombre.
Cette fois-ci nulle question d'enfant possédant le shining (Sorry Billy), l'histoire se passe essentiellement à huis-clos dans un supermarché entouré par le mystère d'une brume épaisse. Un scénario qui apporte un vent nouveau dans le genre de l'horreur, qui en ce milieu des années 2000 était surtout représenté par une majorité de slashers et de films porn-gore de type Destination finale, Saw et Hostel.
Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit : The Mist est loin d'être terrifiant. Du moins, la brume et ses créatures en elles-mêmes ne parviennent pas à inspirer le frisson. J'aime d'ailleurs autant qualifier le film de fantastique plus que réel représentant du genre de l'horreur : le premier tiers du film se charge donc d'insérer petit à petit des événements surnaturels dans le scénario, avec dans l'ordre : la chute des arbres, la brume recouvrant le lac attenant la maison des Drayton, l'arrivée brusque d'un Jeffrey DeMunn complètement paniqué dans le supermarché vociférant que quelque chose de terrifiant se cache dans la brume, et caetera. Le but final étant de transcender le quotidien des habitants de la ville de Bridgton où se passe l'action par l'intervention du surnaturel. L'une des scènes du film révélant
[spoiler] l'implication de l'armée avec le projet Pointe-de-Flèche et l'ouverture d'une brèche dans une nouvelle dimension d'où s'échappe la brume et ses créatures, tend d'ailleurs plutôt à classer le film dans le genre de la science-fiction.
Le manque de tension provenant de l'extérieur était une volonté du réalisateur, qui a préféré concentrer l'attention du spectateur sur la véritable horreur, celle qui sommeille dans le genre humain (Une idée que l'on retrouve fréquemment dans l'oeuvre de Stephen King, de Ça à Simetierre en passant par Shining, où l'intégration d'éléments fantastiques n'est qu'une sorte de prétexte pour pointer du doigt la laideur de l'âme humaine.
Aussi, le second tiers du long-métrage va se concentrer sur les relations entretenues par les personnages retenus entre les murs du supermarché, faisant au passage émerger de fortes personnalités : le leader, incarné par David Drayton, le sceptique Brent Norton que la logique cartésienne pousse à réfuter le danger et affronter la brume malgré quelques preuves tangibles que la brume, il ne faut pas la prendre à la rigolade, et (Parce qu'il en faut toujours une) la prêcheresse hystérique qui jure que la brume est la volonté du Seigneur et la faute des pécheurs et tout le tralala, Madame Carmody. Un excellent cocktail de personnages annonçant à coup sûr une guerre intestine sanglante.
C'est de ces scènes de délire collectif motivées par la peur, scindant le groupe en clans, que va principalement naître le malaise chez le spectateur.
Des dialogues et un jeu d'acteur pertinents et fluides vont contribuer à renforcer la nervosité du film. Un énorme plus quand bon nombre de films d'horreur nous ont habitué à assister aux mêmes scènes clichées et illogiques qui nous donnent presque envie de gifler les personnages pour provoquer une réaction sensée (Là où d'ailleurs, la série télévisée du même nom est complètement à la ramasse.)
Au niveau de la photographie, l'image a un aspect sombre et granuleux qui fait ressortir le côté mystique de la brume et donne au long métrage un petit cachet très eighties. De par son esthétique et son scénario, The Mist n'est d'ailleurs pas sans rappeler The Thing, un autre film du genre Sci-Fi-horror réalisé par John Carpenter et sorti en 1982.
Côté effets spéciaux, le spectateur n'est pas en reste avec des créatures à l'apparence crédible et à l'animation nerveuse. Bon j'avoue qu'au début, ces gros insectes animés avec la motion-capture m'ont un peu fait sourire, maaaaaaiiis remettons les choses dans leur contexte, ce film est sorti il y a 11 ans et possédait un budget assez limité. Les scènes qui marquent l'apparition des créatures s'accompagnent de suffisamment de tension pour que l'ensemble soit finalement réaliste, et j'avoue avoir été convaincue et subjuguée par l'une des dernières scènes montrant l'un des monstres les plus imposants du bestiaire du film, le Behemoth, le tout accompagné d'une soundtrack à faire pleurer les cailloux. Absolument TOUT y est : le son, les bruitages, l'image à couper le souffle de la bête à moitié masquée par la brume, révélée en contre-plongée, le jeu des acteurs encore une fois juste entre l'effroi et l'émerveillement, tout est réuni pour donner au film une vraie identité.
Cette scène figure parmi mes préférées, ex-æquo avec la scène de fin marquante qui cette fois-ci prend le parti de s'écarter de la fin originale imaginée par Stephen King, lequel a toutefois trouvé celle de Darabont tout-à-fait valide et creepy à souhait.
La fin du film se montre tout à fait pessimiste sur l'avenir de nos survivants (David Drayton, son fils Billy, Amanda Dunfrey, la sympathique institutrice interprétée par Laurie Holden, Dan Miller (Jeffrey DeMunn) et Irene Reppler), qui plus tôt se sont échappés en voiture du supermarché où la situation perdait tout son contrôle. Arrivés à court d'essence, perdus au milieu de nulle part dans une brume qui ne désépaissit pas, David Drayton envisage le suicide comme seule option. Problème : il ne reste que cinq balles, pour six survivants. Après avoir utilisé les cinq balles sur ses compagnons (Dont son fils), David Drayton se livre aux bêtes dans la brume. Sauf que loin de rencontrer la mort, David y trouve le salut : la brume soudainement se disperse, dévoilant les tanks de l'armée parvenue à reprendre le dessus sur la brèche dont on parlait plus tôt et traînant dans son sillage un grand nombre de survivants, dont Melissa McBride, la femme qui au tout début du film choisit de sortir du supermarché pour aller retrouver son fils et que l'on croyait morte.
Une fin complètement ironique qui a le mérite de choquer et de bouleverser. Toutefois, je m'interroge encore sur son sens sous-jacent : le regard accusateur en mode "J'te l'avais bien dit" que lance Melissa McBride au personnage principal veut-il appuyer son échec en tant que père, pour s'être laissé entraîner par le désespoir et avoir sacrifié la vie de son fils ?
Parce que bon, clairement, le seul tort du héros aura été de renoncer et de croire toute issue favorable impensable : la volonté de protéger son fils d'une mort atroce (Dévoré par des bestioles hideuses) est ce qui a motivé son geste, et sa culpabilité est palpable. Du coup, qu'est-ce que tout ça veut bien dire ? Que le film aurait pu se terminer autrement, si le pauvre David n'avait pas joué au con ?
L'omniprésence de l'aspect religieux dans le film, avec force récitation de psaumes et passages bibliques par Mme Carmody, m'a fait d'ailleurs tracer un parallèle avec l'histoire de Job, ce personnage de l'Ancien Testament dont la foi en Dieu est mise à l'épreuve par Satan qui s'amuse à lui ôter tout ce qu'il possède, jusqu'à sa famille. Mais, David Drayton n'ayant visiblement pas vraiment une foi aveugle en Dieu le père, j'ai dû assez vite abandonner cette idée.
Une fin qui laisse le spectateur en proie aux interrogations, mais qui clôture le film avec brio et marque les esprits.
Du coup, que penser de The Mist de Frank Darabont ? Eh bien qu'il s'agit d'une excellente surprise à voir de toute urgence. C'est certes un long-métrage qui comporte un certain nombre de petits défauts, mais dont les qualités parviennent à convaincre et font de lui un très bon film.
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