Voici une belle réussite cinématographique. Sur un thème hélas toujours actuel (la corruption des politiques), le réalisateur Kevin Macdonald fait carton plein: écriture cinématographique maîtrisée, fluide, sans tape-à-l'oeil, scénario fin, complexe sans trop, sans zones d'obscurité, sens évident du suspense et du rebondissement... Il s'attaque après tant d'autres à la fragilité des systèmes politiques minés par l'absence de scrupules des ambitieux qui peuplent des hautes sphères. Dans ce registre, je noterai le jeu réussi de l’ambigu député Stephen Collins (bravo Ben Affleck!) incarnant un personnage a priori très sympathique par son engagement pour une véritable transparence démocratique. Personnellement, c'est surtout Russel Crowe, campant sobrement et très efficacement le journaliste entêté, obstiné, voire obsédé par "la vérité" qui m'a impressionné. Ours bedonnant et vieillissant, il saura cependant, tout en restant lui-même, amadouer la redoutable mais finalement sensible Della Frye, jeune collègue aux dents longues qui a tout pour elle, ou presque: beaucoup de charme, une insolente jeunesse et une ambition peu embarrassée de scrupules.
On est d'emblée ou presque rivé à son fauteuil par le besoin de savoir que réussit à nous communiquer le film qui, sans aucune concession aux écueils du genre, nous captive et nous investit de son ambiance lourde. Pas de violence, pas d'explosions, pas de fusillades, pas plus d'hémoglobine - et pourtant, on est haletant...
Jeux de pouvoir est aussi un film psychologique très fin; les personnages ont de l'épaisseur, de la profondeur, de la complexité, des aspects contradictoires. Amitié contre amour; fidélité contre vérité; sincérité contre ambition et dissimulation...de furieux combats font rage en coulisse. Tout n'est pas dit, beaucoup de choses clés sont seulement suggérées, filigranes discrets mais essentiels. Il en ressort une sorte de réalisme, de vraisemblance qui emporte notre adhésion.