Dans un futur indéterminé, un couple et son enfant survivent au sein d'une zone terraformée de Mars. Quelque chose de catastrophique sur Terre a entraîné la fuite de cette famille sur la planète rouge mais on n'en saura pas plus, tout comme, pour l'heure, au sujet d'un danger aux alentours qui semble particulièrement inquiéter le père de Remmy.
Pour brouiller un peu plus les pistes, "Settlers" nous place à la hauteur du regard de cette petite fille volontairement maintenue dans l'ignorance par ses parents. Au-delà du fait que Remmy n'a pas connu la Terre (seuls le substitut que lui offre le quotidien de cette cellule familiale et la transmission à travers l'éducation, les souvenirs, etc, lui permettent de s'en rapprocher), elle vit aussi dans l'inconnu de l'extérieur de cette colonie. Grâce à ce parti pris plutôt malin, le spectateur avance également à tâtons dans la découverte de cet univers, guettant comme Remmy chaque parole de ses parents ou d'autres éléments qui lui permettraient d'en appréhender les règles.
En ce sens, la première partie de "Settlers" est plutôt réussie, le climat de mystère et la montée en puissance autour de cette présence qui encercle de plus en plus cette famille par son emprise psychologique a le mérite de réellement captiver puis, en se dévoilant, de bouleverser les rapports de forces établis jusqu'ici... et la teneur même du film -ou, du moins, ce que l'on avait cru en déceler.
Bien entendu, au vu du ton de ses prémices, on se doutait bien que le contenu de "Settlers" n'allait pas se résumer à un banal survival SF comme les autres mais, compte tenu des ingrédients mis en place, il faut bien avouer que l'on n'avait pas forcément vu venir sa tournure de drame très intimiste centrée sur sa principale protagoniste désormais prise au piège d'un cycle de violence et de bas instincts humains.
Le père de Remmy avait pourtant bien dit que Mars était destinée à subir les mêmes maux que la Terre, on aurait dû le prendre au pied de la lettre car "Settlers" n'est en réalité qu'un récit d'émancipation féminine se servant simplement de son déménagement sur Mars pour amplifier la radicalité parfois versatile des comportements de ses personnages dans un contexte de survie isolée ou pour en dégager une nouvelle portée symbolique par certains outils que ce contexte SF met à sa disposition (l'inconnu martien, un tunnel décisif à traverser, le rôle-clé bien pensé d'un petit robot). Certes, la structure en deux étapes miroirs a du sens, les phases de soumission ou de libération que traversent Remmy face à une figure masculine sciemment ambivalente offrent un parcours cohérent d'émancipation douloureuse, "Settlers" s'en sort également bien au niveau de sa mise en scène ou de la crédibilité de son environnement et permet même à certains de ses acteurs de livrer de belles prestations comme Brooklynn Prince (la petite prodige de la série "Home Before Dark") et Ismael Cruz Córdova mais, si l'on excepte justement le jeu de sa petite comédienne principale attachante, le film a vraiment des allures de désert martien en termes de densité émotionnelle.
En se contentant de suivre avec une trop grande linéarité toutes les conventions les plus établies d'un tel cheminement de récit féministe, Wyatt Rockefeller s'enferme dans la monotonie totale de son propos jusqu'à le rendre stérile sur la force qui devrait pourtant logiquement en émaner. Même les quelques détours métaphoriques spécifiques à ce cadre martien ne parviendront pas à le camoufler: "Settlers" n'est qu'un film s'aventurant sur une nouvelle planète, en l'occurrence la SF, pour y établir une colonie thématique déjà beaucoup trop exploitée sur Terre et dont la répétition ne provoque aucun véritable remous dans le vide interstellaire.