La sortie en dvd, dans une édition de toute beauté, du tout premier long-métrage de Jacques Rivette est un événement dimportance capitale pour tout cinéphile qui se respecte. Tourné dès 1958, achevé en 1960 et finalement sorti sur les écrans en 1961, ce film est, à linstar d« À bout de Souffle » de Jean-Luc Godard, mais pour des raisons différentes, une sorte de manifeste de la Nouvelle Vague. Rompant catégoriquement avec « une certaine tendance du cinéma français », Rivette nest pourtant pas encore de plein pied dans les principes de mise en scène élaborés par les « jeunes Turcs », sans doute car il est en train den écrire ici les principes fondateurs. On sent quil sinspire aussi de cinéastes tel quAndré Cayatte, mais encore, et surtout, de ses grands maîtres tels Howard Hawks, Fritz Lang, Roberto Rossellini ou Louis Feuillade. Pourtant, tous les principes fondamentaux de Jacques Rivette sont déjà présents ici, bien plus quen gestation : la théorie du complot, lexistence de sociétés secrètes, limportance visuelle de la ville de Paris, la rigueur des mouvements de caméra, la prédominance du théâtre au sein du corpus filmique comme mise en abîme du schéma actantiel, le savant métissage entre improvisation et rigueur de lexactitude, tout Rivette est dans « Paris nous appartient ». Le film narre la vie dune jeune étudiante en Anglais, Anne, qui est introduite par son frère dans un cercle dintellectuels artistes politisés dont lun des membres, Juan, vient de se suicider. Ils sont persuadés que leur ami a en fait été assassiné, et quil est le premier de la liste
Ils seraient victimes dun complot politique denvergure, et ils vont entretenir une paranoïa aiguë qui en poussera certains à la folie pure
Comme toujours, Rivette distille les informations de son scénario avec lenteur et parcimonie, beaucoup plus intéressé par linstallation dun climat que par la résolution dune énigme. Dans ce film où apparaissent plusieurs de ces amis dont Claude Chabrol,