« It’s a girl. »
Inconnu de ce côté du Rhin, Sönke Wortmann est un réalisateur célébré en Allemagne pour ses films et documentaires. Il nous offre ici une relecture, tirée d’un roman de Donna Woolfolk Cross, de la légende de la Papesse Jeanne (Die Päpstin) qui permit à de nombreux opposants au pouvoir de la papauté de la condamner ouvertement, des franciscains spirituels à Luther. L’oeuvre, assez classique, nous permet surtout de brosser, outre la parabole du savoir et de la condition féminie, une fresque de l’époque carolingienne, assez rarement dépeinte au cinéma, et de retrouver quelques interprètes sympathiques au premier rang desquels John Goodman mais aussi David Wenham (le Faramir du Seigneur des Anneaux de Peter Jackson, 2001-2003), Jördis Triebel (la Katharina Nielsen de la série Dark, 2017-2019), Nicholas Woodeson (le Posca de la série Rome, 2005-2007) ou encore Iain Glen (le Jorah Mormont de la série Game of Thrones, 2011-2019).
Si l’on fait abstraction de l’histoire en elle-même et de quelques ficelles narratives, dans ce qui commence comme une sorte de bon téléfilm, on pourra apprécier quelques beaux moments et une représentation du IXème siècle assez fidèle à ce qu'il devait être. En outre, l'interprétation assez sobre permet d'éviter les écueils indigestes des mélodrames du genre. A ce titre, celle de Johanna Wokalek rend, loin des canons hollywoodiens et patiemment, son personnage très attachant, traversant une époque. La description, assez fidèle, des moeurs du temps et de ses aléas dramatiques, nous rapproche d'un itinéraire narratif d'oeuvres comme Barry Lyndon (Stanley Kubrick, 1975) ou, en littérature, Léon l'Africain d'Amin Maalouf (1986).
Au final, cette coproduction, internationale mais malgré tout estampillée allemande dans le ton réaliste, propose une relecture intelligente d'un mythe historique dans une reconstitution plus que pertinente. Un film injustement méconnu et une réelle surprise.