L’hôpital, drôle d’endroit pour une rencontre ? Pas tant que ça, le cinéma utilise souvent ce décor, lieu d’émotions par excellence. On s’attend donc à retrouver dans ce type de film, les scènes obligées des visiteurs éplorés, déboussolés face à des malades forts ou désespérés, sur le chemin de la guérison ou déjà condamnés...
Ici, il n’en est rien, le titre du film l’annonce, on s’intéresse à ceux qui restent, et uniquement à eux, les malades sont invisibles, ce ne sont que des portes numérotées que jamais la caméra ne franchit. C’est un parti-pris presque immoral et politiquement incorrect, par les temps qui courent. Mais cela fonctionne, et l’ensemble est émouvant, drôle, et nous concerne tous.
Il faut dire que la réalisatrice a beaucoup d’atouts pour réussir son pari. En premier lieu, un sens aigu du détail, réaliste ou poétique : chaque scène en est truffée et cela donne au film une impression de densité, sous un abord pourtant un peu simple et facile.
Il y a aussi, tout le long du film, un humour léger, parfois gris, parfois noir, jamais lourd. Anne Le Ny, qu’on a souvent vue, et remarquée, en tant qu’actrice dans des comédies émouvantes, chez Agnès Jaoui, Pierre Jolivet, Zabou Breitman et d’autres, maîtrise cette mélancolie joyeuse avec finesse, délicatesse et pudeur.
Mais la plus belle réussite de l’ensemble, c’est le duo Vincent Lindon - Emmanuelle Devos, vrai couple de comédie, tout en contrastes et en opposition; l’un grave, se sentant responsable et comme fermé au monde extérieur, l’autre joyeusement indélicate, ayant une grande soif de vivre, donnant une impression de légèreté (mais ce n’est qu’une impression).
Bien sûr, il ne s’agit pas d’une oeuvre importante, lourde de sens, mais sans en avoir l’air, le film pose beaucoup de questions et a l’intelligence de ne pas donner de réponses toutes faites, à l’image de la fin, ni fermée, ni ouverte, pleine de doutes et d’indécisions, un peu comme la vie.