"Ceux qui restent" aborde un sujet original et assez courageux. Le film met en situation un homme et une femme qui, chaque jour, rendent visite, lui à sa femme, elle à son compagnon, qui sont l'un et l'autre soignés pour un cancer.
Le film nous montre la relation qui naît entre eux. Une relation à laquelle on a du mal à donner un nom. C'est ce que le film va tenter de définir en choisissant de ne pas montrer ceux qui sont malades, ni les médecins, simplement les couloirs, la buvette ou le toit de l'hôpital, et surtout Bertrand et Lorraine qui en ont fait leur quotidien.
Anne Le Ny, la réalisatrice, est comédienne. Et ça se voit dans le film : c'est un film d'acteur pour les acteurs. On retrouve ici le duo qui nous avait ému dans "La Moustache", Emmanuelle Devos et Vincent Lindon. Et une fois de plus on est ému. Le visage marqué par le temps de Lindon avec un jeu sobre tout en intériorité… et surtout Emmanuelle Devos, une fois de plus juste et multiple, drôle, pétasse, poignante… juchée sur des talons, limite vulgaire quelquefois (il y a un peu de la Kate Winslet d'Eternal Sunshine... de Gondry), elle nous touche avec ce personnage qui avoue ses faiblesses, sa colère, son incapacité à supporter ce qui se passe… "Je ne suis pas Mère Thérèsa" dit-elle.
Ce qui fait les qualités de ce film, fait aussi ses défauts. C'est un film de comédienne. Mais ce n'est pas un film de réalisatrice. Anne Le Ny a construit un scénario subtil et juste qui évite tous les pièges, mais sa réalisation n'est pas à la hauteur. En vérité elle est juste "technique". La caméra montre et c'est tout.
Voilà la preuve que Gabin avait tort : un film ce n'est pas qu'une histoire, c'est aussi une mise en scène, des partis pris, un montage.
C'est vraiment dommage parce que "ceux qui restent" aurait pu être un très très beau film d'amour, un film sur la nature humaine, sur la mort, la peur, l'estime de soi, le désir… Au final ce sont quand même ses qualités qui l'emportent.