Randolph Scott est sans doute l’acteur hollywoodien qui durant l’ère du parlant aura tourné le plus de westerns. Il commence sa carrière en 1929 pour la terminer en 1962 sous la direction du grand Sam Peckinpah avec « Coup de feu dans la sierra ». Une centaine de films avec on l’a dit une majorité de westerns le plus souvent de série B mais où il aura tout de même côtoyé des réalisateurs prestigieux comme King Vidor, Henry Hathaway, Henry King, Michael Curtiz, George Marshall, Fritz Lang, André de Toth, Budd Boetticher ou John Sturges. En 1949, il s’associe à Henry Joe Brown pour fonder sa société de production (Scott-Brown puis Rawnon Pictures) qui produira quatorze westerns dont cinq tournés avec Budd Boetticher (sept au total) qui tout en étant ses derniers, demeurent les plus réputés. « Le relais de l’or maudit » tourné en 1951 fait partie de cette série qui voit un Randolph Scott au physique encore svelte incarner un cow-boy flegmatique et marmoréen qui n’a pas besoin de beaucoup de mots pour s’imposer dans un monde où il ne fait pas bon tergiverser quand les balles sifflent autour de vous. Une sorte de Clint Eastwood avant l’heure mais version classique. Roy Huggins producteur, scénariste et réalisateur de télévision met pour l’occasion en scène son premier et unique film pour le grand écran. Scénarisé par Huggins lui-même, « le relais de l’or maudit » indique dans son titre le huis-clos qui va occuper toute la seconde partie du film. La guerre de Sécession est finie depuis un mois mais l’information est loin d’être parvenue jusqu’à toutes les oreilles.
Un groupe de soldats confédérés mené par le Major Matt Stewart (Randolph Scott) massacre un convoi de l’Union pour récupérer son chargement d’or destiné à renflouer les caisses de l’armée sudiste. Apprenant que la guerre est finie les soldats comprennent vite qu’ils sont désormais considérés comme des criminels. De surcroît, leur butin est convoité par une bande de vrais brigands. Une poursuite s’ensuit qui se termine dans un relais de diligence tenu par un père et sa fille qui a vu son mari et son fils tués par les soldats sudiste
s. Le siège qui voit le major et ses hommes terrés dans un espace minuscule se révèle propice à l’explosion des conflits internes qui minent le groupe déchiré sur la marche à suivre. Huggins qui a construit une intrigue parfaitement lisible aux enjeux clairement exposés, maîtrise avec une certaine dextérité les deux phases de celle-ci. La première dédiée à l’action pure dans les grands espaces de Lone Pine bénéficie de la présence à la photographie de l’expérimenté Charles Lawton Jr. (« La dame de Shanghaï » d’Orson Welles, « 3h10 pour Yuma » De Delmer Daves) suivi du huis-clos permettant aux acteurs de donner le meilleur en exposant les conflits et contradictions qui animent leurs personnages. A ses côtés Randolph Scott sobre comme à son habitude mais sachant toutefois libérer l’humanité du major Stewart peut compter sur la trop méconnue et talentueuse Dona Reed mais aussi sur un Marvin Lee encore débutant tout à fait convaincant en brute sanguinaire pour qui descendre un homme ou violer semble aussi simple que respirer. Un Lee Marvin que Scott retrouvera à deux reprises. En conclusion un film très solide qui ne compte pas parmi les classiques du genre mais remplit parfaitement son office.