Le récit fou de la vie d’un dramaturge new yorkais, Caden Cotard, loser hypocondriaque, balloté entre galères affectives et problèmes de santé. Tout ceci prend place dans un univers décalé, semé de détails incongrus. Synecdoche, New York, c’est notre monde, mais en très légèrement différent. Le réalisateur y distille une étrangeté discrète, un surréalisme doux, constamment surprenant, qui contamine peu à peu l’histoire mais ne verse jamais dans le fantastique pur. La réalité et l’imaginaire se mêlent très subtilement, à la faveur d’une mise en scène sensible qui ne scande jamais ces deux plans de perception, les fond au contraire l’un dans l’autre jusqu’au vertige et à la folie. C’est aussi un film d’une tristesse infinie. J’ai rarement vu ça. Son thème majeur, je pense, est la dépression. Cette impression générale d’apathie, de non-appartenance au monde, de lenteur, de pesanteur domine le protagoniste, et le film avec lui, d’une façon radicale. Cela n’empêche pas une certaine drôlerie d’affleurer, en même temps qu’un émerveillement face au monde que Kaufman nous ouvre, mais l’atmosphère générale reste celle d’une mélancolie persistante qui envahit peu à peu l’écran comme le personnage et achève le film dans un océan de désespoir. On sort effondré et passablement impressionné par la maîtrise dont fait preuve Kaufman dans ce film foisonnant et d’une profondeur philosophique, voire métaphysique, vertigineuse. Louons aussi la sobriété géniale de Philip Seymour Hoffman, et le talent de l’ensemble des comédiens qui ont brillamment réussi à se fondre dans l’univers, hermétique de prime abord, de ce cinéaste barjo. Peut-être un peu long dans sa seconde partie, pas toujours abouti et forcément très très trop écrit, mis absolument passionnant, fascinant, puissant, hypnotique, Synecdoche, New York mérite d’être vu, plusieurs fois si possible, pour en mieux saisir toute la jubilatoire complexité. Potentiellement culte ?