Le scénario est une construction géométrique, basée sur un quatuor de personnages, trois filles et un garçon, ce dernier n’étant qu’une silhouette, pratiquement théorique. Chacun est en rapport avec deux autres, faisant naître, exister et briser des triangles amoureux ou des couples : tout est possible et pourtant tout est compliqué. Trois jeunes filles de quinze ans aux prises avec le désir, la séduction, le regard des autres, ça ne peut pas être simple. L’absence totale des adultes, des parents, fait penser aux films de Larry Clark et à d’autres productions du cinéma indépendant américain, mais là où ces derniers mettent en scène des adolescents et leurs malaises pour mieux parler de la société américaine dans son ensemble, Céline Sciamma et d’autres (on pense à Lola Doillon et son “et toi t’es sur qui”) ne s’expriment que sur la difficulté de vivre des adolescents, limitant donc leur regard et leurs ambitions.
Ce scénario, géométrique, schématique, est formidablement riche de potentialités, avec trois personnages féminins totalement différents les uns des autres, évoluant dans un contexte de natation synchronisée, discipline exigeant une parfaite similitude des mouvements : on imagine les contrastes, les oppositions, toute une palette de saveurs...
Mais hélas, la mise en scène reste complètement en deçà des promesses scénaristiques. Pas de sens du cadre, pas de rythme, pas de nuances dans la direction d’acteurs, les scènes s’enchaînent et ne parviennent à créer ni fascination, ni émotion. Adèle Haenel, remarquée dans “les diables” de Christophe Ruggia dans lequel elle était mystérieuse, imprévisible, inventive, est ici monolithique, belle mais sans véritable charme.
Au final, une belle idée, mais noyée sous le schématisme, manquant de corps, de sincérité.