Le mythe du docteur Frankenstein et de son abominable créature aura fait couler énormément d'encre. Mondialement connue, cette légende horrifique a été maintes fois portée à l'écran, dérivée et travestie à travers des comédies même (souvenez vous l'excellent Young Frankenstein "Frankeinstein Junior" de Mel Brooks). Si c'est le film de James Whale de 1931 qui servira longtemps de référence, Kenneth Branagh a su revendiquer sa propre vision du mythe, apportant une bouffée de fraîcheur appréciable. Proposant une version grandiose de l'histoire du Dr Frankenstein et de sa créature, cette adaptation assez libre du roman original de Mary Shelley s'avère être un bon film pop-corn... Voir une série B déguisée en superproduction au budget assez conséquent. L'ensemble du film est inégalement réussi, et mon avis est donc partagé. D'un côté j'ai vraiment été satisfait de la reconstitution historique (XIXème siècle si je ne m'abuse): les plans extérieurs et des villes sont assez immersifs. La direction artistique est sobre mais fidèle à l'époque (du moins je présume). Autre bon point, des acteurs globalement convaincants. Kenneth Branagh, réalisateur mais aussi acteur, campe le rôle du Docteur Frankenstein, rôle qui lui colle bien aux baskets, parvenant à supporter et manifester sans trop de peine toutes les émotions que la psychologique de son personnage et les péripéties de l'histoire lui demandent. De l'autre côté du miroir, dans la peau de l'hideuse, triste et violente créature, un Robert de Niro presque méconnaissable. Un excellent travail réalisé au niveau du maquillage, et de Niro est finalement naturel et bien dans ce rôle à contre emploi. Bizarrement, de Niro n’abuse pas de ses habituelles grimaces faciales de mafioso. Le film fait appel à d'autres acteurs de renoms: Ian Holm, John Cleese et Helena Bonham Carter. Si les deux premiers ne laisseront certainement pas un souvenir impérissable à nos yeux, il est bon de noter que l'ex femme de Tim Burton (Helena Bonham Carter) effectue ici un jeu vraiment appréciable, ni trop mièvre ni trop abstrait. Le film peut donc compter sur ce casting prestigieux et s'avérant somme toute judicieux. Pourtant, l'habit ne fait pas le moine, et de bons acteurs ne font pas systématiquement un bon film. De nombreux manques et imperfections souillent l'aventure fantastique. A commencer par les traditionnelles mais pénibles incohérences :les bougies "immortelles", le froid polaire dans lequel les personnages s'activent, habillés de ridicules pelures de tissus et n'expirant aucune buée. Le pire étant les aberrations scientifiques et les irrationalités physiques que proposent l’œuvre, même si cette dernière ne pouvait certainement pas s'en défaire totalement, car l'histoire de Frankenstein se veut elle même totalement fantastique et surréaliste (en même temps, ce ne serrait pas un mythe si célèbre si tout y était sage et propre). Ceci étant dit, je reprocherais aussi au film son manque d'ambition car, malgré des péripéties prenantes et une histoire d'amour crédible et touchante, le tout manque d'homogénéité et d'inspiration. La plupart des scènes restent assez moles, et les quelques passages plus frénétiques m'ont paru peu crédibles. Enfin, certains aspects restent mitigés: la mise en scène, témoignant de plans parfois très bien conçus (travelling, contre-plongée ...) souffre d'un côté trop classique déplaisant. Une approche plus intimiste et sombre de l’œuvre de Mary Shelley n'aurait pas été à bouder. Heureusement que le scénario exploite bien la psychologies des différents personnages ( de la créature notamment ), insufflant une pensée réflexive intéressante au film. Frankenstein est, vous l'aurez compris, globalement réussi, même s'il n'est vraiment pas assez poussé et fignolé afin de mériter toute notre attention et notre approbation. Un agréable divertissement. 13/20