Alors que le film retrace du point de vue nippon la bataille d’Iwo Jima qui eut lieu au début de l’année 1944, les premières images se situent en 2005. Et pour cause ! Des archéologues japonais ont découvert de nombreuses lettres. Promues comme véritable mémoire de la bataille qui infligea les plus lourdes pertes infligées à la Marine américaine, ces lettres furent répertoriées dans un livre attribué au général Kuribayashi. La nouvelle vint aux oreilles de Clint Eastwood, qui s’empressa aussitôt de porter à l’écran cette bataille sanglante sous forme de double projet : d’abord du point de vue américain, ensuite depuis le côté japonais. Personnellement, il me reste à découvrir "Mémoires de nos pères", m’empêchant de comparer les deux œuvres. En revanche, ce que je puis dire de "Lettres d’Iwo Jima", c’est que ce long métrage est certes un film de guerre, mais pas seulement. Le drame est le genre qui est venu prendre une place non négligeable pour se tailler la part du gâteau de façon équitable. On connait ce cher Clint pour sa capacité à explorer et décrire la psychologie humaine. Il le prouve encore une fois ici, bien que je trouve qu’il manque ce petit quelque chose d’indéfinissable pour donner la pleine puissance à son récit. Ce que je veux dire par là, c’est que je n’ai pas trouvé Saigo (Kazunari Ninomiya) aussi attachant que ça. Sans doute est-ce dû à son côté plus ou moins pleutre provoqué par une promesse quelque peu hasardeuse… j’en sais rien. Pour autant, "Lettres d’Iwo Jima" est un très bel hommage aux hommes qui sont tombés pour leur patrie, et c’est en toute logique que la caméra s’attarde sur la stèle qui a été dressée sur l’île. Ainsi, le spectateur se verra parachuté 61 ans plus tôt, pour finalement y rester durant la quasi-intégralité du film, "Lettres d’Iwo Jima" n’étant rien d’autre qu’un immense flashback si on excepte les deux premières minutes du début, les deux dernières et… le générique de fin. Encore que le cinéaste s’est offert le luxe d’intégrer des flashbacks dans le flashback, procédé plutôt rare dans le septième art. Mais cela a permis de développer encore un peu plus la psychologie des personnages, en particulier celle du général. Placé devant son écran, le spectateur sent que le réalisateur voue une certaine admiration pour ce haut gradé. De même que pour l’indéfectible volonté des soldats japonais. A moins que ce ne soit du profond respect. Mais est-ce que ça ne revient pas plus ou moins à la même chose ? En tout cas il me parait difficile que le spectateur ne ressente pas le respect envers ces soldats qui ont tout donné devant une cause visiblement perdue d’avance à la vue des moyens humains et matériels considérables développés par la bannière étoilée. Il ressort alors un vrai souci de réalisme dans la reconstitution : les costumes, les décors, les accessoires, mais aussi pour cette si particulière façon d’appréhender les choses propre aux japonais. Une belle façon de porter aux nues cette capacité à ne rien lâcher, à rester fier, à l’esprit de sacrifice. Mais aussi une belle façon de replacer les choses, comme le fait que les méchants ne sont pas forcément ceux qu'on croit. Pas le meilleur film de Clint Eastwood selon moi, mais en tout cas un des meilleurs films de guerre donné depuis le point de vue japonais.