Jusqu'à maintenant, "Lust, caution" est le meilleur film de 2008. Lion d'or l'année dernière à Venise, ce drame exalté et charnel sur l'amour et l'espionnage étend des directives divergentes entre elles, et les tient jusqu'au bout, avec un désir d'orfèvrerie magnifique dans la mise en scène. Le film commence, dans un mouvement de caméra sensuel et pesant (au bon sens du terme), avec des femmes jouant une partie de mah-jong. Puis plus tard, la caméra revient sur notre héroïne, dans sa jeunesse, sa soif de liberté dans le pays des interdits. Puis la mise en place d'un groupe de rebéllion contre l'un des chefs de la collaboration avec les japonais, et enfin, la relation bestiale entre elle (l'espionne), et lui (le collaborateur). Dans l'art de l'ambiguite équilibriste, Ang Lee est très fort : il parvient à instaurer des climats différents pour chaque partie de son film, et rend la relation aussi poétique qu'elle est sexuelle. Et dans le gouffre du sexe, le cinéaste ne se prive de rien : gros plans, longues scènes d'amour torrides en forme de piliers scénaristiques, soumission... pourtant, ce n'est pas la gratuité que Ang Lee approche, seulement des regards puissants qui disent la valeur de l'un et de l'autre, et des corps qui s'emmêlent simplement dans des draps, comme une symbiose entre la gentille et le méchant, une concordance entre le bien et le mal qui évite au film tout manichéisme. Ici, peu importe de savoir qui fait quoi à l'échelle de l'humanité ; le réalisateur nous propose de revivre un épisode peu étudié de la seconde guerre mondiale : l'occupation en Chine, et la redoutable chimère d'une jeune femme déterminée mais impuissante face à l'amour, un tableau intime d'une révolutionnaire que personne ne remarque. Décors parfaits, reconstitution plus vrai que vrai, maquillages enivrants, subtilité du scénario, étude comportementale des personnages et sensibilité érotique, "Lust, caution" est un film qui nous touche profondément, directement au coeur, qui s'approc