Commençons par les points positifs du film, ça va aller vite. Le côté hybride du film, culturellement chinois mais très influencé par le cinéma classique hollywoodien auquel il fait de nombreuses réfèrences, n'est pas inintéressant. Et, disposant d'un budget confortable pour un production chinoise, sa reconstitution historique est luxueuse. Cela dit, celle-ci n'est pas non plus exempte de défauts. Ainsi, et comme c'est souvent le cas dans les films historiques à gros budget, elle manque de cachet. Par exemple tous les costumes, même celui du dernier des pouilleux, semblent tout juste sortir du pressing. Autre problème, dû aussi au scénario et à la réalisation, on a beau être dans la Chine des années 30-40, on ne ressent jamais véritablement le contexte historique de l'époque, telle la présence de l'occupant japonais. La faute à un réçit se déroulant essentiellement dans des restaurants guindés et des villas luxueuses. On s'ennuie également beaucoup, en grande partie aussi à cause d'un scénario qui cumule les erreurs. Il est déjà très vieux jeu d'un point de vue romanesque, en particulier dans sa façon de traiter son héroïne. Celle-ci est une nunuche qui reste constament le jouet des hommes et n'est jamais actrice de son propre destin. La conclusion est particulièrement accablante. Après s'être amourachée du Tony Leung et que celui-ci lui est offert un gros diamant, elle craque et le laisse s'enfuir (c'est normal on a à faire à une faible femme au coeur d'artichaut, romantique et maternelle). L'aspect le plus absurde du scénario est de faire perdre au film 1h10 en s'échinant à décrire une première tentative d'attentat avortée, développant à cette occasion un groupe de personnages de jeunes étudiants qui se lançent maladroitement dans l'activisme politique. Ceux-ci scellent leur entrée véritable dans la Résistance via une scène de meurtre au symbôlisme lourdement appuyé et qui lie leurs destins. Le spectateur se dit légitimement que ce groupe et leur action lourde de conséquences vont prendre de l'importance dans le réçit or, à l'exception de l'un d'entre eux, ils vont totalement disparaitre de l'histoire à la grande surprise du spectateur qui peut penser "tout ça pour ça". Il faut encore 20 minutes pour qu'enfin, l'héroïne tombe dans les griffes de Tony Leung. Et là encore déception. On s'attend à ce que le réalisateur mette l'accent sur l'ambiguïté de cette relation, Tang Wei se retrouvant peu à peu prise au piège de ses sentiments envers ce personnage de tortionnaire cruel et manipulateur. On a droit à l'inverse d'un crescendo dans la tention, Tony Leung passant d'un amant brusque à un amant attentionné. Dernière partie où s'accumulent les clichés, Ang Lee semblant penser qu'enquiller les scènes de cul où les acteurs alignent les positions les plus acrobatiques du kamasutra suffit à donner une dimension sulfureuse à leur relation, et du même coup à son film. Si on ajoute la mise en scène de Lee, classique et académique dans ce qu'elle peut avoir de plus pénible et son écriteau clignotant "film à festival", ça fait beaucoup dans la balance. D'autant qu'un an plus tôt est sorti un très grand film sur un sujet similaire, "Black Book". Et c'est peu dire qu'au petit jeu des comparaisons, le chef-d'oeuvre de Paul Verhoeven gagne sur tous les tableaux.