Depuis la sortie en salles françaises de «The Host» (Corée du Sud, 2006) de Bong Joon-ho, un pan entier de la critique et un large tissu du public l'ont encensé. Avant de le découvrir à l'heure où j'écris, c’est donc la promesse (et par là même, la menace) d’un chef-d’œuvre qui nous nargue. «The Host», quand on le voit quatre ans après sa sortie, promet de nous donner une œuvre à la hauteur de ce qui s’est fait de plus grand à son époque. D’autant plus que Bong Joon-ho, n’ayant réalisé depuis que le court-métrage «Shaking Tokyo» et «Madeo», n’a pas démenti son titre de grand cinéaste. Tant que rien de trop grandiose (et forcément de démesuré) ou de trop classique, n’est attendu de «The Host», le film confirme son statut de grande œuvre du cinéma. Son statut-là, «The Host» le tient à ses élans et aux ruptures qui l'articule. S’ouvrant comme un Kaijû (film de monstre) -difficile de ne pas repasser par l’inconscient collectif mené par le Godzilla de Tanaka Tomoyuki-, «The Host» bascule dans le drame familial, puis dans la comédie burlesque avant de mêler tout cela dans un maelström trans-générique. Bong Joon-ho, dans la filière des grands auteurs post-modernes contemporains (Tarantino, Dupieux, Kitano, etc…), brise les frontières du genre. «The Host», embrayant d’une séquence à l’autre vers un nouveau genre, bâtit l’impression d’une richesse sans borne, de multiples films contenus en un seul grand. Une épopée regorgeant d’une pléthore de sentiments à éprouver. Empruntant, pour groupe de protagonistes, une famille de ratés, Bong Joon-ho situe son récit à l’envers des grandes figures hollywoodiennes. Bien qu’aussi fort, en qualité cinématographique, qu’une réalisation de Spielberg, Bong Joon-ho lui est incontestablement supérieur en cela, surtout mais pas seulement, qu’il présente des personnages «handicapés» sociaux (raréfiés à l’écran) où Spielberg –c’est là ses relents poujadistes- se contente du petit-bourgeois de classe moyenne.