Jamais je n'aurais cru être emballé à ce point par une comédie franco-franchouillarde tendance bourgeoisie campagnarde, et pourtant, avec une subtile classe et à travers un riche éventail de thèmes typiquement Assayasien, on plonge dans cette immense réflexion sur l'art dans toute sa globalité : sa transmission, son marché, sa valeur, même son utilité au détour d'une petite scène rigolote, peut être la meilleure. Assayas dresse un schéma cohérent, pose les fondements d'un débat beaucoup plus large qu'il n'y paraît sur l'héritage (le fils de Clint Eastwood fait même une apparition), et l'Histoire de l'art en général (géniale scène au musée d'Orsay), puis, poignant, confronte la valeur de l'argent à celle de l'affectif.
La mise en scène est tout simplement virtuose, toujours en mouvement fluide, sans jamais laisser passer un détail, sur la psychologie des personnages, sur un objet, sur un décor, sur une forme graphique, sur la complexité du monde, mais aussi sur sa simplicité. A noter cette brillante alchimie entre Adrienne qui essaye de se rajeunir, et Jérémie qui essaye de se vieillir, comme constat froid des codes actuels de notre société prédatrice. Ne pas être trop vieux, ne pas être trop jeune.
Le film fait écho à L'Aimée de Desplechin (quand Clean le faisait à Roi et Reine) à tel point qu'on croirait un dialogue entre les deux cinéastes (La scène forte de la maison vide laisse même entrevoir le fantôme de Desplechin). Puis, Assayas reprend le contrôle total de son cinéma avec cette dernière scène fantastique, sa réponse simple et transversale à toutes les questions qu'il a emmêlé deux heures durant. Un espèce de plan-séquence insouciant qui réconcilie les générations, les jeunes et les morts.
Mais subsiste néanmoins cette vision foudroyante de la solitude d'une grand mère, une fois que les enfants sont partis, comme pour nous rappeler que dans ce grand foutoir rock'n'roll, la vie est belle et bien sans pitié.