Le meilleur de la soi-disant "exception française". Une sublime demeure à Valmondois, jardin vallonné, bordé de vergers, au loin, la forêt; des enfants bien élevés qui jouent entre cousins; une vieille dame, Hélène, infiniment distinguée, d'aspect et d'esprit (non, Edith Scob, dans la vraie vie, vous n'êtes pas une vieille dame!); et une maison-musée, avec des petits tableaux de Corot et des meubles de Majorelle, car l'oncle dont la mémoire est l'objet d'un véritable culte a été un peintre impressionniste. Lorsque la gardienne de la mémoire disparaît, pour ses trois enfants, il faut décider du sort de la maison.
Frédéric (Charles Berling, très juste comme toujours), est le pivot du film. C'est le fils aîné, et pour lui tout est simple: la demeure, il faut la garder en état, le temps doit continuer, linéaire, éternel. Il n'en est pas de même pour Adrienne (Juliette Binoche) qui vit aux Etats-Unis et Jérémie (Jérémie Renier) qui s'installe au Japon avec sa famille. Ils ont besoin d'argent. Il faut vendre, avec une dation au musée d'Orsay. Frédéric vit à la fois ce déchirement et la découverte de la sexualité de sa mère car il comprend qu'entre elle et le grand homme, il y a eu bien autre chose qu'une tendresse filiale.
Ce qu'Assayas nous raconte, c'est l'histoire des objets. Ceux qui disent "moi, les objets, ça ne m'intéresse pas, je ne m'intéresse qu'à l'humain" n'ont rien compris. Car les objets, ils sont enrichis de l'attachement qu'on a eu pour eux. Les petits Corot, bien franchement, ils étaient plutôt tartes, mais ils étaient beaux du regard qu'Hélène posait sur eux. Le magnifique bureau de Majorelle, enfoui sous les paperasses, voilà que lorsqu'il est exposé, bien mis en valeur au musée d'Orsay, il devient insignifiant. Quant au vase de Braquemont, sans son bouquet de jardin, ce n'est plus qu'un truc en verre un peu ridicule avec ses grosses pustules....
Voilà, c'est tout, et c'est magnifique, et merci à Assayas de nous avoir donné ce bonheur là.