« Réginald, ce qui se passe ici est contraire à toutes les lois de l’espionnage. »
Après quelques succès d’estime et avant d’enchaîner les comédies populaires, Edouard Molinaro réalise une nouvelle comédie d’espionnage en adaptant ce roman de Charles Exbrayat, avec les frères Tabet (qui dialogueront notamment Le Corniaud, 1965 et La Grande Vadrouille, 1966, de Gérard Oury) qui ont déjà collaboré à Les Ennemis (1962), autre comédie d’espionnage signée Molinaro.
En tête d’affiche, on retrouve la star française de l’époque, Brigitte Bardot, qui a déjà tourné avec les plus grands réalisateurs de l’Hexagone, et Anthony Perkins, tout auréolé de deux rôles majeurs, celui de Norman Bates (Psychose, Hitchcock, 1960) et celui de Joseph K. (Le Procès, Orson Welles, 1962, d’après Kafka). Autour d’eux, toute une série de seconds rôles solides, dont Charles Millot qui reprend presque le même rôle que dans Les Ennemis, Jacques Monod, également présent dans ce précédent film de Molinaro et le fabuleux Grégoire Aslan, un peu tombé dans l’oubli malgré son talent et le fait qu’il a tourné avec les plus grands noms du cinéma mondial.
Si Edouard Molinaro est peu considéré pour son talent visuel, on devra reconnaître qu’il a pourtant l’art de s’adapter au récit. Ici, par exemple, il n’hésite pas à multiplier les plans anglo-saxons, à la faveur d’une histoire se déroulant en Angleterre que vient compléter la musique de Michel Legrand, digne d’une comédie hollywoodienne. On retrouve également ses mouvements parfois vifs de caméra et ses accélérations rythmiques, qui lorgnent du côté de la screwball comedy, incrustations comprises.
Au final, ce film réussit là ou Les Ennemis avait échoué : choisir entre le drame et la comédie. Si ce n’est pas un chef d’oeuvre, Une Ravissante Idiote est un film bien équilibré qui se laisse regarder le sourire aux lèvres et dont l'humour va crescendo, où la blonde incarnée par Brigitte Bardot, qui finit effectivement par être craquante, n’est pas la plus idiote. On notera surtout la prestation décalée d’Anthony Perkins et des autres interprètes, quelques scènes bien ficelées et des micro-détails savoureux. Surtout, le scénario évite soigneusement toute prévisibilité et ça, c’est assez réjouissant.