Pour Philippe Muyl, "Magique, c'est l'arrivée d'un monde de joie dans un monde taciturne." "Avant que le cirque n'arrive, la vie de Betty et de Tommy est banale, rythmée par les habitudes quotidiennes et par les saisons, explique le réalisateur. Ni elle, ni son petit garçon ne vivent dans la joie. Betty souffre de mélancolie et Tommy voudrait tant la faire sourire. Avec le cirque, c'est la liberté, les couleurs, les performances, la passion et même l'absurde qui font incursion dans leur univers. Comme toutes les histoires inventées, celle-ci est une absolue fiction. Mais à force de retrouver les mêmes thèmes, film après film, je me dois de reconnaître qu'elle a certainement bien des points communs sinon avec ma propre histoire, du moins avec mon propre inconscient. Je suis aussi persuadé que, dans le monde plutôt brutal dans lequel nous vivons, au delà de la pudeur qui veut que, dans cette société cynique, il n'est pas de bon ton de laisser s'exprimer sa sensibilité, un film qui ose mettre en scène, avec sincérité et avec humour, la peur de la solitude et le besoin d'amour, ne peut que toucher les spectateurs."
En jouant une fois de plus sur le tandem enfant-adulte, Magique s'inscrit dans la continuité thématique des deux précédents films de Philippe Muyl : La Vache et le Président et Le Papillon. "On retrouve également un thème qui était déjà présent dans mon premier film L'Arbre sous la mer, l'absence de l'un des deux parents, et aussi le désir inconscient de l'enfant de reconstituer le couple parental, et donc la cellule familiale, explique le réalisateur. L'autre point commun, de grande importance, réside en une utilisation des décors naturels au même titre qu'un personnage à part entière. Dans Magique, les grands espaces canadiens, outre leur force esthétique, contribuent à renforcer la sensation d'isolement dans laquelle j'ai voulu placer mes personnages. C'est une vision qui peut paraître quelque peu décalée par rapport au monde actuel plutôt marqué par la solitude dans les grandes villes mais c'est une façon emblématique de mettre l'accent sur cet isolement qui touche secrètement tant de gens."
Philippe Muyl avoue ne pas être un fana de cirque et de films musicaux, à l'exception de Moulin Rouge ou d'Evita. "En fait, j'aime bien la chanson, explique le réalisateur. C'est peut-être un art mineur, mais les chansons balisent la vie, ce n'est pas anodin. J'avais déjà écrit une chanson pour le générique de fin du Papillon chantée par Michel Serrault et Claire Bouanich, je me suis dit que ce serait amusant de faire un film entier avec des chansons. Magique a été une vraie aventure de vie car j'y ai consacré cinq années et à mon âge, cinq ans c'est énorme ! Magique est un film sur la question de la joie de vivre. Sous l'apparence de l'anecdote fabriquée de toute pièce, il est évident que c'est un thème personnel. Le rapport entre l'enfant et la mère vient de mon histoire même si elle est complètement déguisée. D'ailleurs, au départ, l'histoire était celle d'une mère qui veut faire rire son petit garçon et non pas le contraire. C'est après avoir parlé avec Jaco van Dormael à qui j'ai fait lire le scénario que je l'ai réécrit. J'avais inversé la situation pour me cacher un peu plus."
Philippe Muyl a d'abord travaillé seul les textes sans savoir qui allait composer les musiques. Il les a par la suite proposés au chanteur Cali avec quelques indications d'ambiance et de rythme. "Il a fait des maquettes piano, un ou deux aménagements et j'avoue avoir été assez admiratif sur sa manière de mettre ces textes en mélodies, confie le cinéaste. Je suis allé chez lui à Perpignan, on a retravaillé un peu avant d'enregistrer les voix, en sachant qu'elles seraient définitives, tandis que les pianos seraient temporaires. Ensuite, on a tourné en play-back avec les acteurs, ce qui n'est pas simple. On a refait quelques petits aménagements, raccourci quelques chansons au montage et une fois ce travail réalisé, on a fait l'orchestration avec ses copains musiciens."
Concernant le rôle de Baptiste, le réalisateur commente : "En le regardant, je me suis dit qu'il avait le style et le charisme du personnage. Après lui avoir fait passer des essais très concluants, je lui ai donc proposé ce rôle et il a accepté, même si je ne suis pas sûr qu'il se soit rendu compte immédiatement de ce que ça impliquait. Il s'est jeté à l'eau avec une générosité assez incroyable."
Sur Magique, Philippe Muyl a osé filmer quelques scènes oniriques comme celles de la pluie et du beau temps ou de la femme découpée... "Etant donné les difficultés rencontrées pour monter le film, raconte le cinéaste, je me suis dit que j'allais faire un film encore plus libre que celui que j'avais imaginé au début et je me suis donné l'autorisation d'emprunter des chemins bizarres. Je l'ai souvent dit sur le tournage "ce film m'échappe". Il ne faut pas croire qu'on maîtrise tout. Je ne me rendais pas compte du risque narratif que pouvait représenter une scène comme celle avec une femme coupée dans une boîte. Le film appartient je crois au registre du "réalisme poétique". Il démarre sur un registre réaliste, quotidien et, tout doucement, ça glisse dans un registre poétique pour, à la fin, refaire surface dans le réel mais un réel désormais "poétisé"."
Petite, Marie Gillain était fascinée par l'univers du cirque. "On ne pouvait pas passer dans un village avec un chapiteau sans s'arrêter, se souvient la comédienne. Je suis sortie du film, en me disant que c'était incroyable comme il renouait de manière très forte et très intime avec ma propre enfance. Mon imaginaire a été nourri par celui de ma maman qui écrivait des histoires et pour moi ce film, c'est un peu un retour aux sources."
Le tournage s'est déroulé du 20 août au 5 octobre 2007 dans la campagne québécoise.
Avant que le rôle d'Auguste ne fut confié à Antoine Duléry, c'est Arié Elmaleh qui fut pressenti pour incarner ce personnage.