Encore une preuve que la sélection cannoise de 2007 fût un grand cru ; après des chef-d'oeuvres tels que "Le scaphandre et le papillon", "Secret sunshine", "Lumière silencieuse" ou encore "No country for old men", Andreï Zviaguintsev, dont le retour nous avait fasciné, revient pour un deuxième film habité par la mort, l'amour et la croyance. Il n'y a pas grand-chose à dire ici, si ce n'est que le cinéaste fait preuve d'un savoir-faire et d'une beauté hors du commun : des cadrages d'une expression rare, un montage inquiétant, des acteurs en état de grâce, une musique sourde, des décors au minimalisme magnifique, un scénario d'une incroyable densité... "Le bannissement" est un film de matière, lent et silencieux, incarné dans toute sa longueur. Les mouvements de caméras, lourds, superbement étendus, rapprochent ou éloignent les êtres, et arrive à les faire purement exister à l'écran. Mais surtout, "Le bannissement" est un film d'atmosphère : nuageux, surnaturel, christique et triste à la fois, le film cède à tous les styles qu'une fresque (le mot est presque insultant ici) comme celle-là n'impose pas : elle ne l'impose pas car Zviaguintsev contourne le drame familial pour saisir le caractère complètement religieux des rapports humains : il renvoie chaque être humain au sacre, les fait héros, bons ou mauvais, d'un ciel qui s'obscurcit de plus en plus, et dont le bleu, le gris ou le noir laisse au cinéaste le choix de la saveur. C'est un film douloureux, tranchant dans la chair, complexe et insaisissable, une oeuvre poignante sur la rédemption, un ruisseau d'humanité qui coule vers une Terre inconnue ; paysages grandioses de la province Russe, ou bien grisaille d'une zone industrielle qui respire maladivement ses propres déchets, Zviaguintsev place ses personnages dans des lieux quasiment irréels, dénaturalisés, mythifiés par une lumière d'une perfection surréaliste. Utilisant la réduplication dans un scénario qui aurait vite pu alourdir l'ensemble du film malgré sa bea