Ce qui surprend avant tout dans ce film, c'est l'exactitude. Tout y semble millimétré (comme souvent), réglé comme du papier à musique. Les plans serrés des acteurs, formidables de vérité, les superbes plongeons de Tania (Cécile de France), les yeux angoissés du petit François, qui sait à quel point il déçoit son père... Et, cependant, malgré cette précision, l'émotion est au rendez-vous, à chaque instant, au détour des regards (et ce dès la séquence du mariage), au vu des images d'archives qui secouent le coeur (et réveillent soudainement les origines enfouies de François), sur ces plans de cartes d'identité falsifiées, sur ces étoiles jaunes cousues puis arrachées, mais aussi lorsque Hannah sacrifie sa vie et celle de son fils sur l'autel de la jalousie. Par ces mots, "c'est mon fils", elle ôte à son mari toute possibilité de retour en arrière et lui offre en même temps une totale liberté à reconquérir.
"Un secret" est bouleversant parce qu'il remue ce qu'il y a de plus profond en nous : le sens du sacrifice, la perte de tout espoir, la fuite en avant des Juifs pendant l'occupation, leur peur au ventre. Et si, derrière tout cela, se cachent deux magnifiques histoires d'amour, le dénouement montre bien que Patrick Bruel ne retrouvera jamais la plénitude. Il a perdu sa femme et le fils qu'il aimait tant. Il a séduit une autre femme qui lui a fait un enfant, si différent de ce qu'il espérait. Un enfant malingre, chétif, très attaché à sa mère, qui comprendra dès son premier souffle que son père ne l'accepte pas tel qu'il est.
Car voilà, François n'est pas Simon. Deux lettres ont été modifiées dans son nom de famille. Et ce frère, si fameux, si puissant, rêvé par François, a bien existé, avant de mourir à Auschwitz le lendemain de son arrivée. Tout est là, dans ce secret si lourd, révélé par l'excellente Louise (Julie Depardieu), si dévouée, si droite, si parfaite, si altruiste, si seule. Un "secret" qui vaut la peine d'être vu...