Il y a beaucoup de créativité dans ce cinéma-là. Enregistrant sur un mode absurde le mal-être d'un peuple venu du froid, Solveig Anspach signe une petite perle inventive, allumée et, au fin fond, émouvante. Ce n'est pourtant pas le film le plus original qui soit ; toutes les scènes, même surréalistes, paraissent banales puisqu'elles s'accrochent à des décors souvent repoussants malgré leurs beauté. L'hostilité de la Nature, l'inconfort visible du mode de vie, tout vient perturber la magie par manque de couleurs. Pour autant, l'option de tourner dans son propre pays, par volonté, redonne du peps à un pays souvent rebutant dans sa représentation artistique. Farfelu, le film décide de se priver des couleurs délirantes ou autres décors excentriques, bref des artifices ou autres facilités. Tout est inscrit dans une réalité qui, si elle n'est pas au centre du film, n'est jamais bien loin derrière, au fond du plan, et au fond des esprits. La grisaille métallique et sans âme des grandes montagnes de Reykjavik est filmée avec une certaine grâce, privilégieant au maximum la richesse naturelle plutôt que la laideur glauque des constructions qui la parsème. L'interêt du film reste tout de même de mettre en avant l'humour en tant qu'épanouissement, en tant qu'attraction kitsch à l'obscurité des habitats - et des habitants - . Si la drogue est aussi, au-delà d'un ressort comique de 1h30, un aspect plus grave qui dénote des chemins empruntés par une population vouée à l'abandon et à l'échec vu le peu de moyens mis en oeuvres à leur disposition, la réalisatrice islandaise, jamais polémique, en fait un attribut politique éclairant les idées et la suite, redonnant à tout le monde le goût de vivre face à la morosité ambiante. Il y a même un certain délice à voir Anna fumer 6 pylons en une journée pendant que ses acheteurs se défoncent chez elle aux champignons en l'attendant - l'occasion aussi de se régaler du rôle du petit français intellectuel jusque-là bien dans ses pompes - . Mais