Oui, bon, Touchez pas au grisbi est un petit film policier conventionnel qui sans vraiment décevoir n’enchante guère non plus.
Coté casting de bons acteurs certes, mais pour des rôles sans grand relief et somme toute, classiques. Gabin ne force pas son talent pour jouer un personnage basique bien qu’assez intéressant. Lino Ventura n’a qu’une présence anecdotique, et le seul qui m’a finalement un peu surpris ici c’est René Dary, qui se démarque du lot notamment grâce à son personnage, pour le coup un poil plus surprenant. Il y a quelques bons seconds rôles aussi, mais là encore, Touchez pas au grisbi donne l’impression de ne pas leur faire beaucoup de place, en les confinant à des archétypes du polar ou simplement en les mettant de cotés (charmante Jeanne Moreau par exemple mais comme Ventura, très sous-exploitée).
Le scénario est tout de même des plus simples, et le film à un gros souci au décollage. Le début est très laborieux, d’une lenteur frappante, on y verra Gabin se mettre en pyjama, Gabin se laver les dents, Gabin regardant un spectacle, Gabin manger du pâté… bref, cette première partie est d’une rare mollesse. Heureusement dans la deuxième partie ca embraye, et ca sauve clairement le film d’un 1.5 ou d’un 2 pointé. L’histoire se met enfin en place, le film gagne son statut de polar, l’ensemble prend plus de relief, et la gradation s’avère finalement pas mal jusqu’à un final réussi. L’épilogue est tout de même bon.
La réalisation a vieilli, c’est certain. La mise en scène ne fait pas des folies, avec un Jacques Becker assez mou qui se répète beaucoup. A noter ainsi le nombre de scènes avec les ascenseurs, elles sont légions dans ce métrage. Malgré tout l’ensemble est proprement fait, et il se débrouille relativement bien dans l’action vers la fin, sans non plus faire des étincelles. La photographie en revanche n’est pas des plus soignées, avec une trop grande sobriété de ton, et un résultat peu concluant pour les scènes nocturnes. Autant le dire de suite on ne sait presque jamais si l’on est en plein jour ou la nuit, tant les éclairages se ressemblent. Quant aux décors, malgré des idées imaginatives (cool le nu intégral au-dessus du lit du blessé !), ca reste moyen, mais convenables. Ce film ne se démarquant toutefois guère d’autres réalisations du genre de ce point de vue. Enfin la musique est assez répétitive, et souvent envahissante. Plutôt correcte, il faut néanmoins avouer qu’avec un son pas terrible des années 50, les dialogues couverts par la musique sont parfois presque inaudibles.
En clair, Touchez pas au grisbi est un petit film policier qui s’adresse tout de même très clairement à un public déjà conquis. Il ne fera sans doute pas beaucoup de converti au genre polar de la Grande Époque, et cela, malgré un casting alléchant qui promettait une petite référence. L’ensemble porté par un scénario quelconque, souffre de personnages assez conventionnels pas à la hauteur des interprètes. Clairement sauvé par sa deuxième partie, Touchez pas au grisbi arrache la moyenne.