Forcément, lorsqu’on voit la première scène de La Grosse pagaille, on pense irrémédiablement à la 7ème Compagnie, et on se dit que les gags ne vont vraiment pas voler haut ! Si je vous parle d’un mitrailleur qui louche, vous voyez sûrement le topo !
La Grande Pagaille n’est certes pas un grand film, mais c’est une belle comédie. Dans le sens où elle est rondement menée, tout à fait divertissante, et passée la séquence d’ouverture, bien plus maline en général que ce qu’on pourrait croire.
Le grand atout du film, celui qui le transcende, c’est son casting. Le trio Pavone-Hill-Hahn est très réussi. Pavone est un petit bout de femme pimpant et plein de vivacité, et il faut avouer que la drôlerie de la seconde partie lui doit beaucoup. Elle est épaulé par Terence Hill, qui joue un inventeur avec sa classe habituelle et son jeu tout en décontraction fort agréable. Jess Hahn impose lui un aviateur britannique adepte du travestissement (il passera tout le film dans le costume de quelqu’un qu’il n’est pas), et il est non moins convaincant. Evidemment, ce drôle de trio ne serait pas ce qu’il est sans un antagoniste de qualité, et dans ce casting international, c’est Francis Blanche qui s’y colle. Officier allemand type de la comédie populaire, il a un côté sergent Garcia mais cultivé, et il s’en donne à cœur joie avec ses acolytes. Il est très bon ici. En tout cas les acteurs m’ont convaincu, et c’est vrai que ce quatuor est au niveau, et l’on ressent une vraie complicité entre les interprètes.
Le scénario est assez basique puisqu’il reprend des idées pas forcément originales. Un aviateur s’écrase derrière les lignes ennemies, et il va essayer de s’échapper en compagnie de complices, embringués là-dedans un peu malgré eux. Le film est enlevé, porté par des gags pas toujours très fins mais qui font généralement mouche, et l’histoire est réellement tenue. Le souci de beaucoup de comédies de cette époque c’est d’avoir un point de départ mais de virer très vite au n’importe quoi, à l’empilement sans consistance de gags. Ici, il y a une vraie histoire, avec des personnages typés, et le film est donc forcément plus entrainant. Si certaines situations sont des lieux communs du genre et exploitent les clichés sur les Allemands du temps, c’est tout de même proprement ficelé, et l’on passe un bon moment.
Sur la forme ce n’est pas mauvais non plus. On a quelques beaux plans de Florence, notamment la cathédrale, et l’on a l’ambiance italienne ensoleillée et lumineuse. Le film est esthétiquement peu critiquable, et c’est le touche-à-tout hétéroclite de Steno qui se colle à la réalisation, et je dois dire que son film est techniquement bien fait. Belle photographie, beaux décors, une mise en scène enlevée, c’est bien fait et la bande son est très sympathique elle aussi. On est pas dans un sous-produit vite emballé et destiné à surfer sur une mode, c’est un film qui, au contraire, a pu servir de moteur au genre, et on est tout de même un cran au-dessus, à mon sens, de la plupart des concurrents, notamment des Robert Lamoureux.
En conclusion, si vous voulez passer un bon moment, pas de souci, La Grande pagaille est pour vous. Film bien drôle, il utilise peut-être des situations connues et des clichés pour avancer, mais il arrive à introduire suffisamment de nouveaux gags et à être suffisamment bien fait pour faire le faire oublier. 4