La cinéaste possède déjà une maîtrise totale pour un premier film, que ce soit au niveau de l'écriture ou de la mise en scène. Les dialogues sont précis et justes, mais le paradoxe c'est qu'on apprend qu'une large place a été laissée à l'improvisation. Commentant les séquences de disputes ( plutôt nombreuses ) Maïwenn explique qu'une rigueur absolue d'écriture ferait perdre de la crédibilité aux situations et au jeu d'acteur. On peut ne pas être d'accord avec elle, mais ici le résultat parle en sa faveur : rarement aura-t-on été aussi impressionné par la justesse des comédiens, frappés par cette sensation que la fiction s'efface et que l'on voit devant nos yeux quelque chose de vrai. Tout ici paraît naturel, et ne fait donc que renforcer l'impact émotionnel sur le spectateur. Evidemment la mise en scène et les moyens utilisés apportent eux aussi leur contribution à cet aspect si crédible qu'a le film en général. Soit une petite caméra toujours collée aux personnages, captant leurs émotions et sentiments sans rien en perdre. C'est que Maïwenn veut tout filmer, ne rien manquer, traquer chaque indice qui pourrait avoir son utilité dans la recherche de cette vérité qu'elle tient tant à connaître. Cette gourmandise de la part de la cinéaste n'est que très légèrement problématique : certes son personnage ne laisse aucun répit aux autres, et fait voler en éclats leur intimité, mais qu'y faire après tout puisqu'il s'agit tout simplement de Maïwenn, elle est comme ça, point ! L'actrice-réalisatrice se livre corps et âme dans cette première oeuvre, faisant preuve d'une sincérité à toute épreuve. Evidemment elle ne fait pas dans la nuance, mais cela est inhérent à son caractère généreux qui emporte tout sur son passage. L'égocentrisme a ici toute sa place, et le problème - qui finalement n'en est pas vraiment un - c'est que la vérité de chacun est mise de côté au profit de la vérité de Maïwenn. Son point de vue visant à donner la parole à tout le monde ne trouve pas de concrétisation, et c'est bien Maïwenn seule qui emporte l'empathie du spectateur. Mais après tout, c'est un film de Maïwenn, et on se dit que les autres acteurs n'ont qu'à s'emparer d'une caméra et à filmer pour se faire entendre. Ce geste, d'ailleurs, soit l'achat de la caméra et la décision de faire un film, est très symbolique puisqu'il fait suite à la volonté du personnage d'arrêter sa psychanalyse. Le cinéma comme meilleur remède qui soit, très juste.
Pardonnez-moi est un film fort, intense, absolument bouleversant. En décrivant une histoire très personnelle, il atteint à l'universalité en mettant le spectateur face à sa propre vie. Le film met parfois mal à l'aise, comme lorsque les quatre vérités sont dites, que l'hypocrisie tombe en même temps que les masques et que les personnages ne peuvent que voir les choses en face, comme elles sont. Mais c'est le prix à payer pour faire en sorte que les choses aillent mieux, même si évidemment le résultat n'est pas toujours à la hauteur des espérances. La spontanéité et la sincérité de Maïwenn sont des armes indispensables face aux non-dits et à l'hypocrisie ambiante. Son second film s'intitule Le Bal des Actrices. Ici ça serait plutôt Le Bal des Faux-culs. Et forcément il arrive un moment où tout cela doit cesser, et la tension est alors palpable. Ce sont des scènes atroces, poignantes, inoubliables, des réglements de compte qu'il faut à tout prix mettre en scène pour exorciser les blessures passées. Maïwenn/Violette s'oblige à souffrir un peu plus dans le présent, ne fait que perpétuer la souffrance du passé, mais c'est pour mieux préparer son futur. A ceux qui lui reprocheraient de ne pas être sincère, d'en faire trop, il faut rappeler la puissance et la pureté des images d'archives, qui montrent déjà le caractère bien défini de Maïwenn, preuves qu'elle ne triche pas.
Film inouï, nécessaire, une énorme claque qui ne peut absolument pas laisser indemne ni indifférent. Et surtout une sincérité extrêmement touchante qui fait un bien fou dans le paysage cinématographique. Bravo Maïwenn.