Troublant. Voici un film qui, malgré certaines imperfections, ne laisse pas indifférent. La construction dramatique, inspirée de la tragédie grecque, rythme l'intrigue, qui repose sur la manipulation d'un réalisateur par les actrices qu'il choisit pour son film. Autobiographique? Comme le dit lui-même Jean-Claude Brisseau (auquel j'ai eu la chance de pouvoir poser quelques questions), ce film est autobiographique à 20%. Le reste s'appuie sur des "témoignages authentiques" de femmes, réécrits et adaptés pour devenir cinégéniques.
Il est étonnant que des magazines féminins, qui auraient tendance à encenser des ouvrages tels que les Monologues du Vagin et autres écrits féministes (quoique fort utiles), aient descendu en règle un film qui s'avère riche de questionnement, à la fois pour les femmes et pour les hommes, surpris quand on leur dit que 9 fois sur 10, les femmes simulent l'orgasme pour leur rendre service.
C'est sans doute parce que le plaisir féminin est si complexe, si problématique, parce qu'il varie infiniment d'une femme à l'autre, parce que toute simplification est forcément abusive, parce que toute tentative de "classement" est voué à l'échec, qu'il a autant gêné les autorités morales (religieuses s'entend) et a fini par entraîner le déni du droit des femmes à éprouver du plaisir.
Même si le choix des "tabous" est restreint dans le film, il est suffisamment pertinent pour faire éclater certaines vérités, comme le poids insupportable de la pression sociale qui suscite le sentiment de honte, l'obligation au secret, les malentendus...
Brisseau sait filmer ces femmes à la fois avec toute la pudeur, toute la vérité, toute la sensibilité qu'il convient d'adopter pour ne pas sombrer dans la vulgarité, la provocation gratuite et la caricature. Il a voulu savoir s'il était possible de faire de l'art avec la trangression. Force est de constater que le pari est, dans l'ensemble, réussi.