John Cameron Mitchell m'a impressionné. Après Hedwig and the Angry Inch, je ne m'attendais pas à trouver un tel OVNI, aussi affranchi des règles de l'auto-censure. Mais l'intérêt principal n'est pas dans la crudité car le réalisateur (gay) a réussi, avec une grâce aussi drôle que poétique, à fusioner cinéma d'art et porno (gay -ça donne l'occasion de scènes très originales-, hétéro, mélangé, onaniste) tout en dépassant la dialectique assomante du rapport binaire homme-femme. Pour moi, c'est un film de réconciliation entre les deux, ce qui n'est pas advenu depuis les années 1970. Certes, il y a eu Breillat, Bonello, Nolot, mais ici on quitte le genre "grave", glauque, replié sur soi, pour le lumineux, la légèreté, la satire palpitante. Cette fiction désinhibée s'inscrit très bien dans la modernité new-yorkaise, au sein d'un microcosme de marginaux du sexe, absolument pas violents, en quête d'épanouissement par la (plus ou moins) douce subversion. La "pauvre" thérapeute de couples ne sait plus où donner de la tête (ni du reste)... Les personnages (dont quelques beaux mecs) deviennent vite attachants ; on les suit dans leurs délires comme dans leurs souffrances (progressivement dévoilées), à travers un esthétisme magnifique (qui commence dès l'ouverture, avec la maquette numérique de la ville), dans une alternance de sexe, de silences, de doutes, de musiques, de poésie, de folie et de dialogues croustillants. Et au bout, on a droit à un final magnifique, d'une sensibilité à fleur de peau, qui rappelle Hedwig.