« Je Pense A Vous » révèle l’état de suffisance dans laquelle se complait le cinéma français depuis des décennies. Un raffinement dans l’intellectualisme bobo. S’affichant publiquement très à gauche, chevauchant des chevaux de bataille très politiquement corrects (anti-conformisme sexuel, anti-racisme etc…), Bonitzer, ancien maoïste, incarne bien ce cinéma qui n’a jamais cessé en fait de s’inscrire dans une tradition fondamentalement bourgeoise et snobinarde. Peu de situations sont ancrées dans un vécu « des masses ». Contradiction à laquelle n’échappaient pas les maîtres filmeux Godard, Rivette, et Rohmer and Co. Dans ce film, nous partageons les (més)aventures drolatiques d’écrivains à succès, d’éditeurs, de médecins psychiatres, se mouvant dans un Paris aseptisé, qui ont le temps de s’emmerder, avec leurs compagnes névrosées. Le paradoxe est que les partisans de ce cinéma français sont les premiers à critiquer le « libéralisme », le « hollywoodianisme » du cinéma anglo-saxon et américain. Sans s’afficher publiquement à gauche, les Britanniques montrent plus d’ancrage dans le vécu populaire, le quotidien ordinaire en faisant Full Mounty, The Navigators, Loin de chez eux, ou Trainspotting. Les américains en faisant Bubble, Monster, The Woodsman, ou The Machinist. Même les espagnols ont depuis longtemps pris un ascendant sur nous de ce point de vue. Les Lundi Au Soleil, ou La Mala Educacion ne sont pas des cas isolés. De plus, en France où pourtant règnent toutes les mesures protégeant l’indépendance de la culture, on dénonce peu l’establishment. Chez nous, seul Chabrol, et de manière timide et ambiguë fait dans la dénonciation des scandales politico-financier. Mais L’Ivresse Du Pouvoir, dénonce bien moins l’Establishment véreux que ne le font Traffic, Syriana, The Constant Gardener, ou Blood Diamond, pourtant produits par Hollywood, la « machine Libérale » par excellence. Et dire que ce sont les Français qui accusent les Italiens d’en dire plus qu’ils n’en font.