Jeune homme bien élevé, Gaspard est détenu à la prison de la Santé. Un jour, il débarque dans une nouvelle cellule, où se trouvent quatre détenus très amicaux. Rapidement, ils vont l'associer à leur projet d'évasion : creuser un trou vers la liberté...
J'ai été bluffé par ce film de prison vraiment pas comme les autres. Jacques Becker s'inspire d'une histoire vraie, et filme avec précision et méticulosité. Le fonctionnement de la prison, mais aussi et surtout toutes les combines de nos protagonistes pour creuser leur trou. Il faut dire qu'il a du être bien renseigné, s'étant appuyé sur José Giovanni et Jean Keraudy/Roland Barbat, ayant participé à la tentative d'évasion. Ce dernier y joue même son propre rôle !
Loin d'être lourde, cette approche quasi documentaire permet une immersion totale, et renforce un suspense permanent (malgré l'absence totale de musique, chapeau !). Puisque l'on sait que chaque inspection des gardiens peut annihiler en quelques secondes des semaines de travail. Ainsi le simple fait de taper contre le ciment pendant plusieurs minutes devient une vraie épreuve, pour les protagonistes et le spectateur.
La mise en scène de Becker y est pour beaucoup. Les décors, souvent limités à la cellule épurée, sont étouffants. L'éclairage brut et les bétons omniprésents font du "Trou" un film minéral, qui rappelle parfois des classiques du cinéma muet expressionniste oppressant.
Un autre facteur de cette grande réussite, ce sont évidemment les comédiens. Un mélange d'amateurs et d'expérimentés, qui font ressentir le passé trouble et les différences sociales de leur personnages. Mais également la camaraderie qui s'installe immédiatement dans la cellule.
Avec sa débrouillardise, son air alerte, et son visage marqué, Jean Keraudy/Roland Barbat est la vraie star, et il est très étonnant que l'ex-taulard n'ait pas fait carrière au cinéma ! Quelques part cela renforce l'unicité du "Trou"...
Sur le fond, le film n'est pas en reste. Evoquant évidemment la liberté, le fonctionnement de l'administration pénitencière, la confiance entre les prisonniers. En outre le scénario est très loin d'un vision des gentils prisonniers contre les gardiens odieux, que l'on retrouvait encore à l'époque dans certains films de prison. Ici, tout le monde est humain. Les gardiens vont du combinard au rustre pas très futé. Les prisonniers sont pour la plupart avenants, mais peuvent vite devenir inquiétants.
Une vrai réussite, à la fois âpre et humaine.