Je prends No country for old men à la médiathèque du coin et je rentre chez moi et je l'insère dans le lecteur et je le regarde et je suis déçu. Alors je lis des explications sur le film et je le reprends à la médiathèque et je prends une claque monumentale. Pour la majeure partie des gens qui n'auraient pas compris pourquoi il y a tant de "et", c'est parce que le livre Non ce pays n'est pas pour le vieil homme de Cormac McCarthy dont le film est adapté est écrit de cette manière. Et bah voilà : premier visionnage : le film m'intrigue : j'adore et je déteste, je suis fasciné et je comprends pas tout. Alors du coup j'ai décidé de lire le livre et de le revoir ; j'en suis à la moitié du livre et je l'ai revu et j'adore. J'adore tout : j'adore la mise en scène des frères Coen qui est sublime, le montage, les plans, la photographie, tout ! Absolument toute la mise en scène est travailléé dans le moindre détail. J'adore le côté Western/Road movie/Thriller qu'a le film, le fait qu'il vous prend aux tripes du début à la fin, sans vous laisser respirer, à jouer continuellement avec vos nerfs. Car l'histoire de No country for old men est avant tout un duel entre deux hommes, dont l'enjeu est incertain. C'est une course poursuite haletante entre un tueur et un type déterminé à survivre, à travers une Amérique sauvage, aride et propice à cet affrontement légendaire. Les personnages, ensuite ; quelle profondeur ! Même les seconds rôles ont un excellent niveau de développement. Et pourtant, chaque personnage garde sa part de mystère. On a un shérif désabusé, un tueur psychopathe, un homme cupide et traqué, sa femme, et un mercenaire chargé de retrouver le tueur et l'argent. Leurs relations sont bien exploités, et on s'attache à eux (enfin pour les héros) ou on les déteste (pour Chighur, qui est probablement l'un des meilleurs antagonistes que le cinéma nous ait donné). L'absence de musique durant le film rend l'atmosphère encore plus sèche, froide et crue. La violence est plus cruelle, les affrontements sont plus stressants et les dialogues sont plus naturels. L'ambiance de ce film est géniale ; elle est unique, inégalée. Le film est plutôt fidèle au livre (ou du moins, là où j'en suis dans le livre, c'est très fidèle). Et les acteurs : Tommy Lee Jones compose un personnage qui lui colle à la peau, bien plus utile dans l'histoire qu'il n'y paraît, Josh Brolin est excellent dans la peau du cow-boy fier, cupide mais toutefois humain, Javier Bardem offre la prestation la plus marquante du film, avec son jeu de regards et de sourires (à glacer le sang), il compose un personnage effrayant, allégorie du Mal (oscar plus que mérité). Les seconds rôles comme Woody Harrelson ou Kelly Macdonald sont aussi très bons. Les dialogues sont bien écrits, même s'ils sont rares. Car oui, le film privilégie le silence. Il est lent, très lent, sans être ennuyeux. On est captivé par cette lenteur qui instaure une tension qui monte au fur et a mesure que l'histoire progresse. Après il y a des scènes qui ont déplu aux spectateurs comme
la scène de la mort de Llewellyn, scène qui n'est pas montrée mais qui est implicite, moi je ne l'ai pas détesté car au contraire, elle choque le spectateur en lui montrant cette mort de façon plus brutale, plus inattendue. Le personnage de Tommy Lee Jones et son inutilité dans l'histoire a aussi déplu, mais il ne l'est pas : il prend conscience que le monde pourrit, il est l'homme bon rattrapé par les remords face au Mal contre lequel il est impuissant, et son discours final est magnifique : il montre que la mort n'est pour lui qu'un réconfort. La scène de l'accident de Chighur sert à montrer que l'argent qui lui est lié corrompt des enfants, et qu'il sème le mal, même quand il ne le veut pas
. Aucun élément n'est laissé au hasard : les frères Coen sont des génies, car chaque scène est plus importante qu'il n'y paraît. Le message pessimiste que délivre le film sur l'humanité et sa cupidité est inquiétant de vérité.
Un chef-d'œuvre, à voir deux fois pour le savourer pleinement.